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Les aliments lactés vendus sur le marché ne sont pas reconnus par l’Anor.

Agriculture: la tomate en conserve, chasse gardée de l’importation au Cameroun

Depuis la fermeture de la Société des conserveries alimentaires du Noun, le Cameroun est dépendant de l’importation. Pourtant le pays dispose d’un potentiel de production de tomate qui n’est pas exploité.

Collecte de déchets plastiques: entre désir de conformité et obstacles au processus

Plusieurs acteurs de la gestion des déchets au Cameroun ont encore du mal à s’acquitter du permis environnemental de plus de 10 millions de FCFA exigé par le gouvernement pour exercer cette activité.

Découverte: trois étudiants inventent la machine à éplucher les pommes

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La production de la Sonara est devenue insuffisante pour satisfaire la demande nationale, et l’entreprise ne dispose plus d’une trésorerie solide.

22 avr. 2014

Collecteurs de déchets plastiques: Forte carence de financements et d’équipements

Michel Nde, collecteur en manque d'équipements
Les collecteurs utilisent des techniques rudimentaires pour débarrasser les villes au Cameroun de déchets plastiques.
Gant couvert de trou, râteau confectionné de barre de fer atteint de rouille à la main, Anthony Tsamo, s’attèle ce jeudi matin à vider les caniveaux du quartier de PK 8 à Douala. Ce jeune collecteur de déchets ménagers particulièrement du plastique, utilise tous les outils qui trouvent dans les déchets qu’il cure. « Mes équipements, sont confectionnés à l’aide des barres de fer que je ramasse par si, par la », explique-t-il. La même technique est utilisée par Michel Nde, collecteur. Lui, a pu recueillir dans les ferrailles collectées, deux barres de fer, qu’il a reliées auprès des soudeurs pour se faire un râteau efficace.
C'est avec ces gants couverts de trous qu'il collecte les déchets 
Au sein de l’Association Appui au développement communautaire du Cameroun (Adec), les brouettes et pousses utilisées, sont confectionnées à l’aide des morceaux de fer. Certains équipements, sont loués auprès des voisins pour « que l’on puisse exercer aisément notre travail, sinon vous ne pouvez même pas atteindre 10 Kilo de déchets », explique Anthony Tsamo, collecteur de plastique. A en croire ce dernier et plusieurs autres collecteurs, la matière première plastique pullule certes dans la rue, mais les équipements pour les collecter « s’ils ne sont pas efficaces vous ne pouvez rien », souligne Charles Naintezan, Responsable de l’Adec. Ce sexagénaire, est dans l’activité depuis plus de dix ans. Il confie depuis la destruction des fers qui permettaient d’immerger les drains et retenir les bouteilles, son équipe a dû arrêter la collecte dans les drains.
Le même problème est perceptible à Atelier Curage, structure spécialisée dans la collecte des déchets plastiques, les trois moteurs qui permettaient de pomper l’eau et rassembler les bouteilles sont tous tombées en panne. Et, à l’absence de ces équipements pour incruster les drains, plusieurs collecteurs, se contentent de fouiller les poubelles, d’aller de porte à porte… Cependant, le résultat n’est pas très reluisant. Car, « très souvent il faut payer ces jeunes qui vont de porte à porte et il n’y a pas d’argent pour les payer. Alors l’activité reste en stand-by. Ou alors, vous supportez les injures des populations que vous venez aider à se débarrasser de leur plastique. Et, avoir à la fin du mois, à peine 30 kilo de déchets plastiques », indique Michel Nde.
Bien plus, la quantité de déchets plastiques collectée, ne s’écoulent même plus facilement. A en croire, les promoteurs des structures de collecte, les entreprises recycleurs ont une grande préférence pour les objets plastiques déjà broyés. Car, ils ont moins de difficultés à les trier. Et, pour avoir un broyeur, Le reporter a appris auprès des collecteurs, qu’il faut débourser en moyenne 5 millions de FCFA, en occasion. Les déchets plastiques, notamment les bouteilles, non broyés, sont achetés par les entreprises comme la Société d’hygiène et de salubrité (Hysacam). L’Adec, confie que l’entreprise envisage de payer à son équipe à 50 FCFA le kilo de bouteilles plastiques.
Et pour les autres plastiques comme les sachets en plastique, la clientèle a essentiellement diminue. A l’Adec, l’on explique qu’avec l’augmentation de l’importation des granulés en plastique venus du Nigéria et du Tchad, très peu d’entreprises de recyclages sollicitent encore cette matière première. Une concurrence, qui a poussé la dizaine de femmes de l’Adec a arrêté l’activité pour retomber dans le chômage. Dans les sites des collecteurs, l’autre difficulté reste le stockage des déchets plastiques collectés. Certains collecteurs, entassent leurs déchets la plupart du temps près des habitations ou derrière leurs domiciles. Et, pour le responsable de Atelier Curage, la communauté urbaine de Douala (CUD) et les collectivités territoriales décentralisées, « devraient au moins nous aménager les sites pour ces stockages et afin que nous puissions respecter les normes de collecte et protéger l’environnement », souligne Michel Nde…

Christelle Kouétcha

Collecte de déchets plastiques: Entre désir de conformité et obstacles au processus

Plusieurs acteurs de la gestion des déchets au Cameroun ont encore du mal à s’acquitter du permis environnemental de plus de 10 millions de FCFA exigé par le gouvernement pour exercer cette activité.

Les collecteurs veulent débarrasser la nature des déchets plastiques mais à quel prix?  
Bépanda petit Wouri, au lieu dit Pont Bao, à Douala. Alors que le soleil est au zénith ce mercredi 16 avril 2014, des hommes vêtus de blouse bleue, courbés dans un amas d’ordures, qui jouxte le pont, sont imperturbables. Ici, c’est le site de l’association Appui au développement communautaire du Cameroun (Adec). Depuis plus d’une dizaine d’années, cette association s’est spécialisée dans la collecte des déchets ménagers, parmi lesquels les bouteilles plastiques. Et, ce mercredi après midi, les trois membres de l’association présents sur les lieux, s’attellent à trier tout ce qui est plastique dans le kilo de déchets collecté dans les ménages et les artères des quartiers, la veille.
Ce sont les bouteilles PET (Polyéthylène téréphtalate) qui intéressent les collecteurs. Ces bouteilles sont aussi bien celles des eaux minérales, que des jus. Un bac à ordure de la société d’hygiène et de salubrité du Cameroun (Hysacam), estampillé Plastic-Recup, un projet mené par l’entreprise et la Société anonyme des brasseries du Cameroun, pour débarrasser l’environnement des bouteilles plastiques de marque Tangui, est installé sur le site de l’Adec. Les bouteilles plastiques collectées, sont donc reversées dans ce bac. Responsable de l’Adec, Charles Naintezan, confie que par semaine, son équipe réussit à collecter auprès des ménages et dans les poubelles, entre 10 et 20 Kg de bouteilles plastiques. La récupération de ces plastiques se fait à l’aide des brouettes, des tricycles.
Mais, ce n’est pas le cas dans la structure Atelier de curage, appartenant à Michel Nde, un autre collecteur. Sa jeune équipe, sillonne les artères des quartiers de l’arrondissement de Douala 3ème, avec des sacs pour récupérer tout ce qui est plastique. Ainsi, en plus des PET, son unité s’intéresse aussi aux chaises en plastiques, aux récipients, jouets appareils électroménagers en plastique. Bref, tout ce qui s’apparente au plastique et qui traine dans les caniveaux, les drains, les rues, Michel Nde, se charge de les enlever. « Ce sont des matières non biodégradables, donc qui ne se décomposent pas sous l’action des champignons et des micro-organismes présents dans le milieu. N’étant pas dégradables, les plastiques sont une cause de pollution durable, ils causent l’encombrement des canaux d’évacuation », déballe fièrement le collecteur, ses connaissances reçues au cours des formations en collecte de déchets plastiques. Dans les drains, ses équipements sont les râteaux confectionnés avec des fers issus de la récupération, des pelles, des tridents…
L’activité de l’Adec, de l’Atelier curage et plusieurs autres associations est « louable », car la pollution de l’environnement par le plastique reste un goulot d’étranglement au Cameroun. C’est ce qui témoigne d’ailleurs les chiffres relevés par la Communauté Urbaine de Douala (CUD) dans l’édition de janvier de 2013 de « Environnement magazine ». En effet, d’après la CUD la production journalière de déchets dans la ville de Douala par exemple, est estimée à 1500 tonnes et les déchets plastiques y sont représentés à 8,37% soit 125.55 tonnes. La production industrielle en déchets plastiques est estimée à 15 250 tonnes par an, en plus de 250 millions de bouteilles en plastiques PET qui sont mises sur le marché camerounais chaque année. Il faut les débarrasser  de la nature, surtout que ces déchets plastiques « constituent une matière première que l’on a sans avoir en acheter », analyse Michel Nde.
Mais, pour débarrasser la nature de ces déchets plastiques, il faut payer. Les collecteurs comme l’Adec, Atelier curage, et plusieurs autres structures engagées dans cette activité de collecte, sont soumis au paiement d’un certain nombre de caution. Ainsi, comme le stipule l’arrêté du 15 octobre 2012 du ministère de l’Environnement, de la protection de la nature et du développement durable fixant les conditions d’obtention d’un permis environnemental en matière de gestion des déchets, les collecteurs de déchets plastiques (des déchets classés dans la catégorie des déchets non dangereux par le Minepdd ndlr) doivent verser avant le démarrage de leur activité une caution financière plafonnée à 10 millions de FCFA et d’une quittance de versement d’un montant de 100 000 FCFA. Soit un total de 10, 1 millions de F CFA. Le permis environnemental n’est valable que pour 5 ans. 
Ainsi, que la structure soit ONG, association, petite et moyenne entreprises (PME), Très petite et moyenne (TPE) ou que le collecteur soit individuel… tout le monde paye. D’ailleurs, depuis le 15 avril 2014, le sursis d’exonération à ces cautions du permis environnemental, a pris fin, apprend-on auprès du délégué régional du Minepdd, pour la région du Littoral, Sidi Bare. Et, chez les collecteurs, particulièrement les petits collecteurs, qui fonctionnent pour la plupart sous fonds propre, débourser plus de 10,1 millions de FCFA, pour se conformer à la réglementation seulement, constitue une asphyxie. Car, « cette somme nous ne savons même pas où on va la trouver, dites moi quelle banque peut accepter financer un projet de collecte de déchets ? Difficile, car ces institutions ne croient pas à ce type de projet. Bien plus, vous allez débourser un tel montant, et vous allez vous équiper avec quoi ? », s’interroge Michel Nde. Lui, et plusieurs autres collecteurs rencontrés voient  en ces cautions, un paradoxe, vu que « notre activité consiste à débarrasser la nature des déchets que nous n’avons même pas jeté », s’indigne, un collecteur. Surtout que, le coût d’obtention d’un permis environnemental dans la cadre de la collecte des déchets plastiques est deux fois supérieure à celui relatif à l’activité de tri, collecte, transport et élimination finale des déchets toxiques et/ou dangereux, déchets médicaux, pharmaceutiques et déchets hospitaliers liquides,  car la quittance à payer est de 200 000 FCFA et la caution à fournir de 2 millions de  FCFA.
Dans les structures qui accompagnent ces collecteurs comme la Fondation camerounaise de la terre vivante (FCTV), et le Groupe d’initiative commune (GIC) Bellomar, à titre d’exemples, les responsables estiment qu’avec le coût pour l’obtention des permis environnementaux, l’engouement des collecteurs va considérablement s’atténuer et les plastiques continueront de polluer l’environnement. « Soumettre les collecteurs a un permis environnemental c’est bien car cela permet d’organiser le secteur. Mais, demander des centaines de millions à des personnes qui n’ont que des microstructures, et qui n’arrivent même pas à s’ouvrir sur le marché, car la quantité collectée est souvent très faible, n’est pas encourager le développement de ce secteur florissant », Martial Bella Oden, promoteur du GIC Bellomar.  A en croire ce dernier, l’activité de collecte des déchets est a plus de 90% menée par les petits collecteurs au Cameroun.
Point Focal FCTV à Douala, Job Léonce Tonye, relève en outre que les autorités gagneraient à saluer l’effort des collecteurs de déchets. Ceci, en offrant à ces derniers des accompagnements, comme cela se fait dans les pays comme le Nigeria et l’Ouganda. LQE a appris auprès de ce dernier, qu’au Nigéria par exemple, les collecteurs bénéficient des appuis gouvernementaux à travers des fonds publics. Des appuis, qui facilitent la collecte des déchets plastiques et qui aujourd’hui a permis au Nigeria d’être le plus gros fournisseur de granulés en plastique au Cameroun. « Dans ce pays, les collecteurs sont si motivés et mieux équipés, qui réussissent à collecter au moins 5 000 tonnes de plastiques sans problème, contrairement à nos collecteurs », révèle-t-il. Collecteur de déchets de plus de dix ans, Alexis Sandjong, quant-à-lui ne manque  pas de se demander « si nous déboursons même les 10 millions qu’on nous exige, nous allons collecter combien de kilo ou de tonnes de déchets plastiques avec nos pioches, pelles pour compenser ses dépenses ?» A en croire ce dernier, sans les machines modernes adéquates, les collecteurs réussissent à peine à faire 100 Kilo de déchets plastiques par semaine.
Des contraintes d’accessibilité au permis environnemental, qui selon certains experts en environnement, peut se résoudre par la catégorisation des permis. Et, par catégorisation, « l’on attend que l’Etat détermine clairement les petits, moyens et grands collecteurs et fixe le coût du permis en fonction de ces catégories. Et, pourquoi pas rendre gratuit le permis pour des collecte individuel qui font du porte à porte », explique, Job Léonce Tonye. Celui-ci, confie que même les structures qui  offrent des formations aux collecteurs, sont également concernées par ce permis environnemental plafonné à 10 millions de FCFA… Raison : ils sont aussi proches du circuit de gestion des déchets plastiques.
D’autres spécialistes en environnement, estiment plutôt que pour un début et vu l’ampleur de la pollution des déchets plastiques, l’exonération au permis environnemental pour les petits collecteurs pouvait encore s’étendre, même pour deux ans. Mieux, « il faut une fiscalité adaptée aux activités de collecte et de valorisation des déchets. Car, ceux qui mènent cette activité mène une activité d’intérêt général et ne peuvent pas être taxés comme ceux qui exercent les activités commerciales », souligne Martial Bella Oden, tout en prenant l’exemple des allègements fiscaux des entreprises agricoles, qui bénéficient des exonérations des TVA à la vente et aussi de l’impôt sur les sociétés.

Christelle Kouétcha

16 avr. 2014

Cameroun: Le miel importé dicte sa loi

Le miel camerounais boudé peut servir dans les boulangeries, le brassicole.

Les étals des supermarchés à Douala et à Yaoundé, sont inondés de bouteilles de miel importées. Sur les étagères de ces commerces, les variétés sont diverses. Ainsi, on peut par exemple trouver sur les étagères du supermarché Mahima à Yaounde des miels importés comme, Capilano Honey, Dabur Honey, Real value Honey, Belle France Miel de fleur, Real Fresh, miel de fleur liquide …
Ces miels importés conditionnés dans des boites de 250g et 500mg, viennent de France, d’Australie, du Maroc, d’Egypte, de grande Bretagne, des Etats Unis… La concurrence de ces produits, est « grande », fait observer Casimir Ngangue, délégué de la Gic Apipeme.  A l’en croire très peu de grandes surfaces commerciales sollicitent le miel camerounais. Quelques responsables de ces commerces rencontrés n’ont pas souhaité donner les raisons. Toutefois, le reporter a remarqué dans les supermarchés Mahima et Acropole a Yaoundé, que le miel camerounais exposé « n’est pas très sollicité par la clientèle », souligne un responsable des rayons au supermarché Mahima. Il indique néanmoins que les clients camerounais consomment le miel importé par « curiosité », mais les plus friands sont les étrangers. Conséquence, « il est difficile de voir les bouteilles de miel étranger mettre plus de deux mois sur les étals, comme celles camerounaise qui durent des mois », confie un vendeur à Acropole. Le miel importé vendu dans ce magasin par exemple, a été rafle en moins d’un mois apprend-on.
Pourtant, le miel importé « contient des produits chimiques nocifs pour la sante, contrairement au miel camerounais qui est produis naturellement », explique l’apithérapeute, Casimir Ngangue. Comme lui plusieurs autres apiculteurs soutiennent, qu’une politique commerciale nationale doit être mise en place pour valoriser le miel camerounais. « Le gouvernement peut fixer un quota d’importation afin que le miel camerounais trouve sa vrai place », propose Simon Koum, apiculteur. Le miel camerounais est « majoritairement » utilisé par les ménages. Pourtant, le miel est important pour l’agroalimentaire, les boulangeries, les sociétés brassicoles, le cosmétique. « Si le miel naturel du Cameroun est utilisé pour la fabrication des gâteaux ou des jus, on aura des produits thérapeutiques qui permettront aux consommateurs de fournir de bon rendements dans leur service », conclut le délégué d’Apipeme.
Christelle Kouétcha


Le miel frelaté pullulent les étals au Cameroun

Les consommateurs sont dupés avec du miel mélangé à plusieurs autres produits.

La cour de la cathédrale Saint Pierre et Paul à Douala, ne désemplit plus de vendeurs de miel. Dès les premières heures de la matinée, les commerçants exposent leurs bouteilles de miel sur les comptoirs. Ici, on trouve toute sorte de miel, notamment le miel noir, le miel brun. A en croire les commerçants, la plupart des bouteilles de miel exposées dans ce marché est achetée auprès des apiculteurs. Cependant, une « grande majorité » de revendeurs s’est lancée dans la fabrication de leur propre miel.
Toutefois, ce n’est pas toujours du bon miel que l’on retrouve dans ces marchés spontanés de miel. Délégué du Gic Apiculteurs et petits métier à Yaoundé, Casimir Ngangue souligne que l’absence des normes de commercialisation du miel handicape la maîtrise de la vente. L’apiculteur précise que les marchés sont inondés par du miel désintégré. En effet, le miel exposé au soleil par les commerçants se « retrouvent vider de leur vitamine A et des enzymes du fait de la forte chaleur. Par conséquent toute la valeur nutritionnelle du miel est détruite », explique-t-il. 
Des techniques pour détériorer la qualité de miel et tromper le consommateur, sont multiples. Casimir Ngangue, révèle que plusieurs commerçants « véreux » utilisent la banane mûre, qu’ils caramélisent et le mélange avec un peu de miel pour augmenter la quantité qu’ils ont acheté. « A première vue on pense que c’est du miel, mais à la longue cela va se fermenter et peut se transformer comme du sucre », précise-t-il. La papaye, et le sucre sont aussi utilisés pour frelater le miel, apprend-on. Les apiculteurs relèvent que cette prolifération des miels mélangés, se justifient par l’abondance des commerçants dans le circuit de vente, que les apiculteurs. « Le commerce de miel doit être bien suivit et ce n’est que la personne formée en apiculture qui peut respecter les normes », précise le délégué de l’Apipeme, tout en déplorant la non intervention du ministère du commerce qui ne veille par à la qualité de ce produit.
Le commerce du miel est également confronté à une « forte » contrefaçon. Plusieurs Gic d’apiculteurs ont confié que leurs produits, sont copiés par des producteurs véreux. « Les gens mélangent le miel avec des produits inappropriés et y collent nos étiquettes contrefaits. Nous voyons nos clients dupés », confie un apiculteur de l’association des meilleurs miels de la Cemac. Le reporter à appris que le Minepia travaille encore avec les apiculteurs pour établir « clairement » les normes de commercialisation du miel.

Christelle Kouétcha

Miel: Une production rudimentaire au Cameroun

La faible production local de ce produit intéresse plus  les pays frontaliers.

La production du miel au Cameroun est encore paysanne, fait observer les apiculteurs. Délégué du Gic Apiculture et Petits Métiers (Apipeme), Casimir Ngangue, soutient que le manque de subvention et le faible portefeuille des apiculteurs constituent un véritable frein au développement du secteur et une faible production du miel. « Depuis plusieurs années le Cameroun ne tenait pas en compte ce secteur. Il y a seulement moins d’un an qu’une direction pour ce secteur a été mis sur pied au ministère de l’agriculture », indique-t-il.
En effet, les apiculteurs réunis en Gic ou travaillant dans les Ongs évoluent avec des fonds propres et des aides des partenaires. Plusieurs rencontrés confient qu’il faut débourser des centaines de millions pour avoir des matériels qui permettront accroître la production. Limité en financement, plusieurs se campent sur des petites productions qu’ils peuvent réaliser avec en moyenne 200.000 Fcfa. « Avec cette somme on peut débuter au moins avec cinq rushes, pour produire près de 50 litres de miel après trois  mois », explique Casimir Ngangue. Il révèle que des apiculteurs réunis en association peuvent produire plus 100 tonnes de miel par an. Une production qui peut « croitre si le secteur est organisé et subventionné », souligne-t-il en relevant le caractère vétuste des appareils des apiculteurs.
Le miel produit au Cameroun vient de l’Adamaoua, de l’est, du nord-ouest de l’ouest, du sud-ouest… La qualité du miel dépend de la végétation et du climat. Ainsi selon l’échelle de qualification, il existe plusieurs types de miel notamment le miel brin foncé, brin clair, blanc. « Ce sont les fleurs des végétation qui impulse la couleur du miel. Le miel est brin foncé par exemple parce que la végétation sur laquelle les abeilles ont bitumé produit des éléments qui est le fer », explique Bonifase Kenvang, apiculteur.
Le miel camerounais est vendu dans les pays frontaliers au Cameroun, parmi lesquels le Gabon, la Guinée Equatoriale, le Congo, la Rca. Selon le GicApipeme, le Gabon est très friand du miel camerounais. Un projet pour former les apiculteurs au Gabon est « entrain d’être mis en place avec les autorités du pays », confie Casimir Ngangue. Une école d’apiculteur pour la sous-région est également en cours. Quelques apiculteurs « essayent » d’écouler leur miel vers l’Angleterre, le Maroc et autres pays de l’Union Européenne. Mais le flux de commercialisation n’est pas maitrise, car « chaque apiculteur utilise ses moyens propres pour écouler son produit », relève Casimir Ngangue.

Christelle Kouétcha

9 avr. 2014

Le BIR intimide les pygmées


Les Baka de pauvres victimes
Les agents du Bataillon d’Intervention Rapide (BIR) sèment la terreur au sein des communautés Baka dans la région de l’Est. Associés dans la lutte anti-braconnage, ces agents passent outre leur mission et rançonnent les pygmées. « Comme ils savent que l’on a peur d’eux, ils viennent nous arracher les produits ou les gibiers sans nous payer ou alors ils vous donnent ce qu’ils veulent », raconte, Roger Njoumbé, élite du village Lopango. À en croire ce dernier, les éléments du Bir n’hésitent pas à tirer sur des Baka lorsqu’ils sont surpris avec un gibier. 

Certains Baka, révèlent qu’ils sont parfois sollicités par ces éléments pour des opérations de braconnage puisqu’ils connaissent bien la forêt. Des aides qui ne sont pas toujours payées : « Nous travaillons pour certains patrons du BIR. Nous les aidons à tuer le gibier et à la fin de la journée ils ne nous payent rien. Même pas un morceau de viande. Tu ne peux pas te plaindre, sinon tu te mets en danger. Puisqu’il a tous les moyens pour te coller une étiquette de braconnier », relate Roger Njoube, chasseur Baka, très sollicité par les braconniers.

Quelques prostituées rencontrées dans le village Socambo, à la frontière du Cameroun et du Congo, confient qu’elles s’assurent toujours d’avoir comme amant des éléments du BIR,  ainsi « comme les pygmées ont peur d’eux, je vais pouvoir m’approvisionner en macabo, viande boucanée, en plantain… à faible coût et en grande quantité »,  indique Darling Kouga* prostituée venue de Douala. Elle ajoute qu’en compagnie d’un élément du BIR, elle peut acheter une assiette de « Djasang » (un condiment utilisé dans la cuisine locale) à 1 000 Fcfa voire 500 Fcfa alors que les pygmées le vendent normalement à 3 000 Fcfa.

Christelle Kouétcha

*Nom d’emprunt




Richards Ndongo: Martyrisé par le WWF

Agé de 40 ans, cet autochtone Baka a été copieusement battu par des agents de cette Ong internationale

Richards Ndongo: Martyrisé par le WWF
Richards Ndongo, 40 ans, n’arrive plus à marcher depuis bientôt un an. Originaire du Village Lopango, ce pygmée Baka raconte qu’il a été copieusement battu par des agents de la World Wide Fund For Nature (WWF). La scène s’est produite au mois de mai de l’année dernière. Le Baka, était accompagné de son fils Justin Kema, lorsque les agents de « dobi dobi » (c’est ainsi que les Baka désignent familièrement le WWF) l’ont empoigné dans la forêt. « J’étais allé chercher de la viande en brousse pour manger avec ma famille. Sur le chemin de retour, les agents de WWF, m’ont surpris avec un petit sanglier et m’ont bastonné », raconte-t-il.

Selon son récit, les agents de WWF ont utilisé leur ceinture pour le battre. La tête, le corps, et surtout le pied ont reçu des coups de ceinturon. Justin, le fils, explique que les agents de Wwf ont battu son père pendant plus de deux heures sans relâche. Lui, il a réussi à se cacher dans la forêt pour regarder comment son père était battu : « Je ne pouvais rien. Voir mon père gémir et supplier sans cesse étai insupportable. Je me suis alors enfui pour retourner au village ».
Richards Ndongo, a été dépouillé de son sanglier et laissé pour mort au cœur de la forêt. « J’ai passé plus de cinq jours en forêt. Blessé, je traînais le pied pour arriver. Au village, on me croyait mort », pleure le Baka, tout en confiant « je n’oublierai jamais le visage de cet agent du WWF ».

Affaibli, Richards Ndongo a été conduit d’urgence à l’hôpital par l’épouse du chef du village. « Le pus sortait de partout. Je ne pouvais même pas me lever. J’ai fait plus de deux mois à l’hôpital avant de sortir car il n’y avait plus d’argent. Le mal n’est pas fini, je ne peux plus rien faire. Ni les champs, ni la pêche, ni la chasse. WWF m’a rendu inutile pour mon village et ma famille », se plaint Richards Ndongo.

Il s’insurge contre les restrictions données aux Baka de chasser, alors que dans le même temps, des safaris venus d’Europe pour la plupart tuent des animaux sans pitié et comme ils veulent. « On interdit aux Baka de chasser, mais on laisse les blancs venir tuer des animaux pour le plaisir », se désole Richards Ndongo. Surtout que, constate-t-il, pendant ces safaris, les animaux tués et abandonnés ne doivent pas être touchés par la population. «  Les safaris laissent la viande pourrir en forêt ; pourtant des familles entières ont faim », regrette cet homme, les yeux larmoyants.

Christelle Kouétcha



Le chemin de croix des enfants des zones forestières au Cameroun


Dans les villages où les exploitants forestiers passent, là où elles existent, les écoles sont de simples hangars ou des maisons en terre battus où les élèves sont souvent assis à même le sol.

L’accès à l’éducation n’est pas chose aisée dans les villages voisins des exploitations forestières dans la région de l’Est. Plusieurs parmi eux n’ont toujours pas d’établissement scolaire. Dans le campement Baka de Kanyol, les enfants sont obligés de marcher sur près de 10 Km pour se rendre à l’école primaire. Les quelques écoles en fonction sont construites pour la plupart en terre battue, en planche ou avec des feuilles. Le plus souvent c’est la présence d’un drapeau dressé dans la cour qui informe de la présence d’une école. Au Village Lopango à Yokadouma, ce sont les hangars et les vieilles maisons abandonnées qui servent de salle de classe. « Nous avons demandé que l’on construise une école dans le cadre de redevance forestière. Un jour on a été surpris que l’on vienne plutôt nous bâtir ce vieil hangar », regrette Jean Marie Bandjo, un habitant du campement.

Dans certains villages, les exploitants forestiers n’ont jamais daigné construire une école. À Dimako et à Mayos, les établissements scolaires sont l’œuvre des Ong. Les élèves, en nombre pléthorique, sont assis à même le sol, ou sont assis sept à huit par banc comme c’est le cas à l’école primaire d’Eboumetoum. Les enseignants affectés dans cette zone sont constamment absents. Ils se plaignent du mauvais état de la route et du manque de matériel didactique.

Difficultés

Élite du village Mayos et ex-conseillère municipale, Georgette Olinga confie que cette année, les élèves du campement Mayos ont fait près de deux mois sans voir leur enseignante tellement la vieille route abandonnée par la SFID était glissante après la tombée des pluies. Certains enseignants affectés dans ces zones expliquent qu’ils ne disposent pas de garantie de sécurité, ni d’équipement et de logements nécessaires pour répondre présents à leur poste.

Dans les villages éloignés du centre-ville, quelques enseignants bénévoles dispensent les cours, non sans difficultés. Plusieurs de ces écoles saisonnières ne disposent pas d’équipements et de matériels didactiques : tableaux, craies, cahiers, livres…
Au village Monmikouboung  (ce qui signifie "petit ruisseau qui garde les Baka") par exemple, les élèves utilisent un morceau de contreplaqué comme tableau. En général, les élèves d’ici ont de la peine à se présenter aux examens officiels, car ils ne sont pas à la page des enseignements. Les élèves admis dans les classes du secondaire éprouvent d’énormes difficultés à continuer les études, car près de la moitié des villages de la région de l’Est ne dispose pas de lycée ni de collège. Plusieurs sont contraints de se rendre à Yokadouma, Bertoua, Yaoundé ou Douala pour poursuivre les études. Encore qu’il faille que la famille dispose d’assez d’argent.

Christelle Kouétcha



Exactions: Le WWF accusé de brimade

Les pygmées Baka accusent les employés de cette Ong internationale d’agression et d’abus de pouvoir depuis qu’ils se sont installés dans la région pour contribuer à la régulation de l’exploitation forestière.


Une des victimes
L’Ong Worldwide Fund For Nature (WWF) n’est pas la bienvenue chez les pygmées des communautés Baka (premiers autochtones de la localité) de la région de l’Est. Plusieurs communautés villageoises confient qu’elles sont victimes de plusieurs cas d’agressions et de brutalité orchestrés par des agents du WWF. Dans les villages de Monmikouboung et Lopango situés dans le voisinage de Yokadouma par exemple, les hommes et les femmes ont la chair de poule lorsque le nom de Wwf est prononcé. « Le WWF n’a pas pitié de nous. Quand ils nous trouvent dans la forêt, ils nous tapent sans pitié », révèle, Paul Bossi, élite du village Lopango.

À en croire les Baka, les agents de cette Ong n’ont aucun « scrupule » lorsqu’il s’agit de battre sur eux. Ceinturons, machette (Bala Bala), branche d’arbre, sont utilisés pour brimer le Baka. « Lorsqu’ils nous trouvent en forêt, c’est le sauve qui peu. Sinon dès que tu es arrêté, tu es ligoté comme un gibier avec des lianes ou des ficelles. D’autres te traînent au sol avant de te battre. Certains te frappent sans se soucier de toi », raconte Réné Loumo, un habitant du Village… Si le Baka est surpris avec un gibier, il est soumis à un traitement plutôt « militaire ». Les éléments du WWF le contraignent à grimper dans un arbre dont le tronc a été préalablement enduit d’huile de vidange. À la moindre glissade qui est inévitable, le Baka est frappé. « Ils nous disent que c’est une correction pour que nous ne chassions plus. Pourtant, depuis toujours, nous vivons de la chasse », constate Jean Marie Bandjo, Baka de Lopango.
Par crainte de ces brimades, les femmes aussi ne se rendent plus dans la forêt comme autrefois. « Quel héritage nous allons laisser à nos enfants. Nous ne pouvons plus entrer dans la forêt pour leur apprendre comment chasser. Ils ne peuvent plus reconnaître les traces du Nguebi ou du Sinatunga. (c’est ainsi qu’ils désignent la girafe en langue locale). La forêt c’est notre lieu sacré et de repos. Mais le WWF, le BIR, le Safari nous bloquent », regrette Richards Ndongo, l’une des victimes du WWF.

Répression

Coordonateur du WWF à Yokadouma, Louis Defo rejette en bloc les accusations des Baka. Pour lui, elles sont « non fondées », tranche-t-il sans s’expliquer davantage.
Appolinaire Balla Ottou (chef de section faune et aires protégées à la délégation département de la Forêt et de la Faune pour la Boumba et Ngoko) quant à lui soutient que le WWF n’est pas chargé de la répression. Pour lui, les Baka confondent les agents du WWF avec ceux de la délégation régionale de la faune et de la forêt qui empruntent parfois le véhicule de cette ONG. « Même si les agents du WWF voient un Baka avec du gibier, il doit juste informer la délégation », soutient-il.

Pourtant, selon des rapports et des témoignages de Baka recueillis par les ONGlocales comme le Cefaïd (Ong qui œuvre pour la protection de l’environnement et des droits des autochtones), plusieurs Baka ont été flagellés et arrêtés injustement dans des affaires de braconnage et autres. « Nous avons enregistré plusieurs plaintes de Baka qui accusent des employés du WWF. Ils ne sont pas bêtes les Baka, ils connaissent bien leur bourreau », déclare Victor Amougou, coordonnateur du Cefaïd. Ce faisant, il brandit la plainte d’un Baka, dans laquelle il accuse un agent du WWF de bastonnade et de l’avoir exploité pour le braconnage étant donné sa connaissance de la forêt.

Christelle Kouétcha



Redevance forestière: Une taxe mal distribuée

Les populations des villages de la région de l’Est accusent leurs dirigeants de détournements

« L’exploitation forestière a plutôt appauvri la population locale dans la région de l’est », déclare Samuel Nguiffo, secrétaire général du Centre pour l’environnement et le développement (CED), ONG qui milite pour la protection de l’environnement. Cette ONG travaille depuis plus de 20 ans sur l’exploitation forestière au Cameroun. En effet, dans l’écrasante majorité des communautés villageoises qui ont connu l’exploitation forestière, la redevance forestière annuelle (RFA) n’est pas redistribuée aux riverains. La RFA est l’un des multiples impôts que les exploitants forestiers payent. La loi accorde 10 % de cette redevance aux communautés riveraines, 50% à l’Etat et 40% à la commune du lieu où la forêt est située.

Dans la ville de Yokadouma qui compte 15 UFA (unité forestière aménagée), les ressortissants d’une dizaine de villages confient qu’ils n’ont jamais reçu leur part de cette RFA. Les œuvres sociales qui sont censées être réalisées avec la contribution des villageois n’ont jamais vu le jour. Des responsables de la commune, sans consulter le village comme l’indique la loi, ont construit des ouvrages « inutiles » dans les villages, en l’occurrence des hangars qui, en plus, ne sont pas toujours achevés.

Au village Parny par exemple, l’ex-maire Abomo Moampamb Paulin a érigé un vieux hangar là où le village avait demandé une école et un dispensaire. Ledit hangar, construit en matériaux provisoires, n’a jamais été achevé depuis près de 10 ans. À en croire Félix Douokassamb, chef de Parny, la mairie leur avait dit que le hangar avait coûté 8 millions de Fcfa. Pendant ce temps, le village est dépourvu d’école et les enfants doivent marcher sur près de 5 Km pour se rendre à l’école publique de Mendoungué. Le constat est pareil au village Song Nouveau, où un vieux hangar a été construit à la place de l’école sollicitée par les riverains. Ce hangar, inachevé lui aussi, aurait coûté plus de 10 millions de FCFA selon les responsables de la mairie lors de l’inauguration. Il est aujourd’hui transformé en salle de classe, tout comme les maisons de personnes décédées, qui accueillent les enfants qui sont de plus en plus nombreux.

 Secrétaire général de l’APE (Association des parents d’élèves) à l’école publique de Mendoungué, Hippolyte Doum, confie que la mairie avait promis de réfectionner l’école. Le coût de la réfection avait été estimé à 3 millions de Fcfa. Plus de cinq ans après, seuls un table-banc et une feuille de tôle ont été remis à l’établissement. Dans d’autres villages, la mairie a engagé la réfection de puits. Les villageois confient qu’en moyenne, quatre sacs de ciment ont été utilisés par la mairie qui a évalué le coût des travaux à 4 millions de Fcfa, selon les élites du village.

En 2007,  l’ex maire de Yokadouma,  Abomo Moampamb Paulin avait été arrêté dans le cadre de l’opération Epervier pour  détournement de derniers publics, notamment de la RFA. Léon Nkantchou, nouveau maire installé depuis près de quatre ans, n’a pas encore engagé de réalisations. Pourtant « l’Etat reverse normalement ce qui doit revenir aux riverains. Mais depuis l’année 2006 que le nouvel exécutif a été installé, on ne sait pas comment l’argent est géré », indique Didier Empihp Abelang, chef de cellule de foresterie et de développement communautaire à la commune de Yokadouma. Il confie par ailleurs que des dénonciations et des requêtes ont été faites à l’encontre du nouvel exécutif. Sans suite.

Dans les autres villages comme Dimako et Eboumetoum, il n’y a pas l’ombre d’une œuvre réalisée grâce à la RFA. Directeur de la société d’exploitation forestière Pallisco, Michel Rougeron a confié que sa société a toujours payé son impôt de RFApendant ses années d’exploitation à Eboumetoum. « Le problème de la redistribution ne vient pas des compagnies d’exploitation forestière. La plupart d’entre elles paient leurs taxes. Mais c’est l’Etat et la commune qui n’assurent pas leur part de contrat », fait remarque Samuel Nguiffo du CED.

À Dimako, les populations rapportent que le maire de la commune organise des soirées festives toutes les fins d’année « pour voiler la face des riverains. » « Le maire est venu ici nous donner du maquereau et changer le manche de notre forage qui a été offert par l’ONG Plan Cameroun. A part cela, rien depuis plus de 50 ansIls nous ont dit qu’ils ont dépensé plus d’un million pour remplacer le manche du forage », affirme Georgette Olinga, ex-conseiller municipal à la mairie de Dimako.

Il n’a pas été possible de rencontrer les différents maires de différentes communes pour comprendre la situation. Car un communiqué signé du préfet du département mettait ces responsables sur leur garde contre une équipe de reporters et d’ONG qui devaient réaliser des reportages dans la localité.


Christelle Kouétcha

Yokadouma: Le Sida tue des centaines de personnes

La prolifération de l’exploitation forestière attire les belles de nuit qui sont exposées à des personnes infectées.

« Le Sida est l’une des maladies qui tuent le plus dans la région de l’Est et particulièrement dans la ville de Yokadouma », constate Sœur Juliane Martine, responsable du centre de Santé Sainte Thérèse du diocèse de Yokadouma (CSSTDY). Selon les statistiques enregistrées dans cet hôpital, 97 cas de personnes vivant avec le VIH-Sida sont dépistées par mois. Au dernier dépistage gratuit qui s’est tenu au sein du centre en 2010, 100 personnes sur les 800 dépistées ont été déclarées séropositives. « Ce sont des chiffres que nous avons à notre disposition. Il y a des centaines de filles infectées dans les villages qui refusent de faire des tests. Puisqu’avoir le Sida dans cette zone est une honte et un déshonneur », affirme Sydonie Mafo, infirmière.

Technicien analyste au CSSTDY, Vincent Ngba, révèle que la majorité des personnes infectées sont des jeunes filles âgées de 15 à 25 ans. La plupart étant des prostituées originaires du Cameroun, de la Centrafrique et du Congo. « Les filles ne veulent pas se prendre en charge. Elles savent qu’à Yokadouma l’exploitation forestière donne de l’argent. Confrontées à la pauvreté, elles se livrent au vagabondage sexuel », indique Sœur Juliane Martine. Les filles prostituées viennent par avion ou empruntent des camions de grumes. Le prix du voyage dans un camion de grumes du Congo ou de la Centrafrique pour Yokadouma coûte 40.000 Fcfa. Mais le plus souvent « nous nous arrangeons avec le chauffeur en échangeant une partie de plaisir contre le voyage », confie Arlette, congolaise qui fait la prostitution depuis près de cinq ans. Elle révèle qu’elle a été obligée de se prostituer dès que sa maman qui subvenait à ses besoins est décédée.

Quelques associations pour aider les femmes séropositives ont vu le jour dans la localité. L’association Tantine de Yokadouma, œuvre dans ce sens. Présidente de cette association, Sandrine Djoukouo déclare que sur les 40 filles séropositives enregistrées dans son association, il ne reste que quatre femmes encore en vie. Les autres ont été emportées par la maladie. « Elles ont honte de leur maladie. Plusieurs dépriment quand on leur annonce qu’elles sont infectées. D’autres filles se suicident », révèle la présidente. Au passage, elle déplore le manque d’assistance et d’aide dans les centres de santé et les associations. Les responsables du CSSTDY sont obligés de se rendre à Bertoua dans le centre de santé publique pour recevoir un paquet minimum de médicaments qui dure à peine trois mois du fait de l’importante demande. Les malades du Sida, quant à eux, ont reçu des paquets insuffisants d’antirétroviraux il y a deux ou trois ans. « L’hôpital de Bertoua, nous demande d’attendre la réaction de Yaoundé. Jusqu’à ce jour, rien », regrettent les responsables de ce centre. Parallèlement, des demandes d’aide ont été déposées à la mairie de Yokadouma. Sans suite…

Christelle Kouétcha


Appolinaire Balla Otou: « Les safaris utilisent les Baka »

Le chef de section faune et aires protégées à la délégation départementale de la faune et de la flore pour la Boumba et Ngoko explique comment les pygmées Baka sont utilisés par des braconniers

 Appolinaire Balla Otou
Qui sont les acteurs du braconnage dans la région de l’Est ?

Tout le monde est braconnier. Il n’y a pas de profil exact. Ça peut-être vous et moi. En fait, en analysant bien, le braconnage est l’une des conséquences de la pauvreté, et de la vie facile que certaines personnes recherchent.

Pour lutter contre le braconnage, il y a des interdictions d’entrer dans la forêt. Ce qui handicape les peuples autochtones comme les Baka…

Les études ont été menées en concertation avec les ONG locales et internationales, les représentants des riverains. Il y a eu des concertations avant le zonage. Ce n’était pas fait au hasard. Les restrictions qui ont été faites, visent à rendre certains espaces exploitables afin que des gens n’y collectent pas des revenus qui peuvent aider au développement et projets. Les Baka en bénéficient d’une façon ou d’une autre. Il y a des œuvres palpables partout où la zone est giboyeuse. Le zonage a tenu compte des Baka par rapport aux autres riverains. On interdit aux Baka d’entrer dans la forêt pendant les Safaris, car ils peuvent être atteints par une balle perdue. Le zonage, la chasse sportive créent des pressions sur leur mode de vie. Nous sommes encore en pourparlers sur certains parcs.

Mais qu’est ce qui explique que des safaris qui sont des étrangers ont des droits de chasser alors que les autochtones comme les Baka qui chassent pour leur alimentation ne peuvent pas le faire ?

Je ne peux pas répondre à votre question comme si c’était un débat. Je peux aller plus loin et vous dire que le Baka même c’est le premier braconnier ; car il maîtrise la forêt. Ainsi, quand quelqu’un s’accroche à  lui et lui demande de lui montrer le premier endroit où on peut trouver les éléphants, le Baka est le premier à prendre les devants. Il est le premier porteur de l’arme. Ce ne sont pas eux qui organisent le commerce de la viande de brousse, mais il participe en assistant généralement le braconnier à col blanc, qui peut être même un agent du MINFOF. Les safaris utilisent les Baka, car ils se disent qu’ils n’ont pas la possibilité de rendre compte de leur forfait à un moment ou à un autre. J’ai eu plusieurs cas dans mon département. J’ai été obligé de jouer parfois le rôle de juge et de défendeur. A priori le Baka ne consomme pas n’importe quel gibier. Si vous trouvez un Baka avec un gibier qui ne rentre pas dans sa consommation, c’est qu’il est au service des safaris. Par conséquent, il se livre à des abus.

Les Baka accusent WWF, l’un de vos collaborateurs, d’exercer des actes de répressions à leur égard…

Vous savez, dans cette zone, pour peu que vous soyez habillé en vert, on dit que vous travaillez pour WWF. Ce sont les agents du MINFOF qui font la répression. L’agent de WWF joue le rôle d’informateur. WWF vient en appui au MINFOF à travers des financements et des véhicules.


Propos recueillis par Christelle Kouétcha

Les exploitants forestiers ruinent la forêt

Destruction des essences et changements climatiques sont autant de problèmes auxquels font face les autochtones après le passage des exploitants forestiers.

Branle-bas au campement de Pygmées Baka à Yokadouma. Dans un « mangouma » (c’est ainsi qu’on appelle les maisons typiques des pygmées), une femme couchée sur un pagne se tord de douleur. Bibiane, la dame en question est éplorée et a le regard fuyant. De son front dégouline de la sueur. Ses paires assis près d’elle, ne cessent de lui faire avaler de l’eau. Depuis près de deux semaines, Bibiane a des problèmes pour allaiter son nourrisson : le lait de ses mamelles a de la peine à couler. La jeune maman n’arrive pas à supporter la douleur. Les guérisseurs assis auprès d’elle n’arrivent pas à trouver de solution. Ils indiquent que le sapeli, l’arbre dont ils utilisaient des parties pour soigner ce type de mal, n’existe plus dans la forêt.

La Fipcam (Fabrique Camerounaise de Parquet), l’exploitant forestier qui y a passé près de 60 ans d’exploitation a coupé toutes ces plantes dans la forêt. Le sapeli n’est d’ailleurs pas le seul arbre concerné. En effet, plusieurs espèces d’arbres utiles pour les autochtones dans les zones forestières de l’Est Cameroun ont été détruites par les exploitations forestières.

Catastrophe

Près de deux ans après le départ de plusieurs de ces compagnies forestières, les villageois ont de la peine à se soigner et à se nourrir. Les plantes étant leurs principales ressources pour la cuisson et la santé. Dans les villages Baka de Dimako, c’est pratiquement la catastrophe. Au campement Mayos par exemple, la centaine des Baka qui y résident ont un seul souhait : « que les Ongs qui peuvent faire payer la SFID (Société Forestière et Industrielle de Doumé ndlr) le fassent ». Ici, l’exploitant forestier a été sans pitié pour les autochtones. Tous les arbres utiles pour l’alimentation et la santé, notamment le sapeli et le moabi, ont été coupés par l’exploitant.

Les moabis ont par exemple été tous terrassés par la SFID (Société Forestière et Industrielle de Doumé). C’est pourtant l’un des arbres précieux pour les Baka grâce à ses vertus ; ce produit est par exemple utilisé pour la cuisson, le traitement de certaines maladies,  Aujourd’hui, il n’en reste que deux dans les environs du village. L’un est situé à près de 2 km du campement. « Nous souffrons. Nous sommes obligés d’aller à des kilomètres d’ici pour acheter de l’huile pour la cuisine. Pourtant on en avait plein ici ». À en croire les villageois, pendant 60 ans d’exploitation de « leur » forêt, ils n’ont jamais perçu de RFA (Redevance forestière annuelle). L’espace vierge laissé par la SFID est devenu la forêt communautaire où les villageois plantent des tubercules pour la nutrition ; ou pour aller revendre afin de pouvoir s’acheter des médicaments ; car les forêts ont été vidées des plantes médicinales qui les aidaient.

Replanter les arbres

Le sapeli était utilisé pour le traitement des cancers, des céphalées, du paludisme ou pour aider les femmes enceintes… Certains exploitants forestiers, sans doute pour voiler les yeux des riverains, ont entrepris de replanter les arbres coupés. Dans la société Pallisco, une politique pour replanter les moabi qu’ils coupent a été instaurée. Malheureusement, ces arbres ne pourront avoir une taille raisonnable que d’ici 200 voire 300 ans, selon Richards Fousséni Feteke, responsable de la cellule d’inventaires et d’aménagements chez Pallisco ?
Dans d’autres villages, en plus de la forêt qui a été vidée  de ses essences, le sol n’est plus fertile du fait de son exploitation abusive. Du village Lontimi jusqu'à Dimako, depuis le passage de la SFID (60 ans d’exploitation) le climat a changé à Dimako. Les villageois expliquent que les produits qu’ils plantent ont des difficultés à pousser.«Quand la SFID a fini de nous exploiter, nous nous sommes retournés vers l’agriculture. Aujourd’hui, il fait exagérément chaud. Nos cultures ont de la peine à produire », raconte Yves Ndambala, ex-défourneur à la SFID. Il confie que depuis deux ans, il récolte à peine cinq sacs de maïs sur sa plantation qui lui produisait plus d’une trentaine de sacs autrefois. Aujourd’hui la SFID a regagné la forêt de Mbang dans la Kadey à 140 Km de Dimako. Les habitants de cette localité craignent déjà de subir le même sort que leur voisin.

Christelle Kouétcha