9 avr. 2014

Yokadouma: Le Sida tue des centaines de personnes

La prolifération de l’exploitation forestière attire les belles de nuit qui sont exposées à des personnes infectées.

« Le Sida est l’une des maladies qui tuent le plus dans la région de l’Est et particulièrement dans la ville de Yokadouma », constate Sœur Juliane Martine, responsable du centre de Santé Sainte Thérèse du diocèse de Yokadouma (CSSTDY). Selon les statistiques enregistrées dans cet hôpital, 97 cas de personnes vivant avec le VIH-Sida sont dépistées par mois. Au dernier dépistage gratuit qui s’est tenu au sein du centre en 2010, 100 personnes sur les 800 dépistées ont été déclarées séropositives. « Ce sont des chiffres que nous avons à notre disposition. Il y a des centaines de filles infectées dans les villages qui refusent de faire des tests. Puisqu’avoir le Sida dans cette zone est une honte et un déshonneur », affirme Sydonie Mafo, infirmière.

Technicien analyste au CSSTDY, Vincent Ngba, révèle que la majorité des personnes infectées sont des jeunes filles âgées de 15 à 25 ans. La plupart étant des prostituées originaires du Cameroun, de la Centrafrique et du Congo. « Les filles ne veulent pas se prendre en charge. Elles savent qu’à Yokadouma l’exploitation forestière donne de l’argent. Confrontées à la pauvreté, elles se livrent au vagabondage sexuel », indique Sœur Juliane Martine. Les filles prostituées viennent par avion ou empruntent des camions de grumes. Le prix du voyage dans un camion de grumes du Congo ou de la Centrafrique pour Yokadouma coûte 40.000 Fcfa. Mais le plus souvent « nous nous arrangeons avec le chauffeur en échangeant une partie de plaisir contre le voyage », confie Arlette, congolaise qui fait la prostitution depuis près de cinq ans. Elle révèle qu’elle a été obligée de se prostituer dès que sa maman qui subvenait à ses besoins est décédée.

Quelques associations pour aider les femmes séropositives ont vu le jour dans la localité. L’association Tantine de Yokadouma, œuvre dans ce sens. Présidente de cette association, Sandrine Djoukouo déclare que sur les 40 filles séropositives enregistrées dans son association, il ne reste que quatre femmes encore en vie. Les autres ont été emportées par la maladie. « Elles ont honte de leur maladie. Plusieurs dépriment quand on leur annonce qu’elles sont infectées. D’autres filles se suicident », révèle la présidente. Au passage, elle déplore le manque d’assistance et d’aide dans les centres de santé et les associations. Les responsables du CSSTDY sont obligés de se rendre à Bertoua dans le centre de santé publique pour recevoir un paquet minimum de médicaments qui dure à peine trois mois du fait de l’importante demande. Les malades du Sida, quant à eux, ont reçu des paquets insuffisants d’antirétroviraux il y a deux ou trois ans. « L’hôpital de Bertoua, nous demande d’attendre la réaction de Yaoundé. Jusqu’à ce jour, rien », regrettent les responsables de ce centre. Parallèlement, des demandes d’aide ont été déposées à la mairie de Yokadouma. Sans suite…

Christelle Kouétcha


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