Des produits laitiers non certifiés en circulation au Cameroun

Les aliments lactés vendus sur le marché ne sont pas reconnus par l’Anor.

Agriculture: la tomate en conserve, chasse gardée de l’importation au Cameroun

Depuis la fermeture de la Société des conserveries alimentaires du Noun, le Cameroun est dépendant de l’importation. Pourtant le pays dispose d’un potentiel de production de tomate qui n’est pas exploité.

Collecte de déchets plastiques: entre désir de conformité et obstacles au processus

Plusieurs acteurs de la gestion des déchets au Cameroun ont encore du mal à s’acquitter du permis environnemental de plus de 10 millions de FCFA exigé par le gouvernement pour exercer cette activité.

Découverte: trois étudiants inventent la machine à éplucher les pommes

Ils envisagent mettre en place un modèle destiné aux ménages.

Hydrocarbures : Les vraies raisons de l’augmentation des prix au Cameroun

La production de la Sonara est devenue insuffisante pour satisfaire la demande nationale, et l’entreprise ne dispose plus d’une trésorerie solide.

23 oct. 2014

Sandales : Le Nigeria, principal fournisseur du Cameroun



Aucune entreprise camerounaise ne s’est encore lancée dans la fabrication de ce produit.  
Les sandales made in Nigeria confisquent les étals
Les comptoirs au marché Ndokoti à Douala au Cameroun, ne désemplissent pas des sandales à lanière à base de caoutchouc. Que ce soit au marché Dacat, ou Monkam, ces babouches communément appelées « sans confiance », confisquent les étals. Les consommateurs, en ont pour toutes les couleurs et pour toutes les tailles. Enfants, adolescents et adultes, ont juste le choix à faire. Ces babouches très usuelles dans les ménages au Cameroun, sont essentiellement importées du Nigéria, apprend-on auprès des grossistes du marché Central de Douala. Importateurs de sandales depuis plus de 20 ans, Ernest Kamdem, confie que par mois, ce sont des millions de tonnes de « tongs » en caoutchouc qui sont déversés au Cameroun. Ces chaussures sont « pour la plupart fabriquées localement par des ressortissants nigérians, en particuliers ceux de la communauté Igbo », nous apprend un ressortissant nigérian.
Néanmoins, certains commerçants confient que quelques uns de ces produits sont importés de la Chine. Mais « à faible quantité car les chinois sont plus spécialisés dans la fabrication des babouches en plastique », précise Antorien Kwendeu, grossiste au marché Congo. Difficile d’avoir la quantité exacte de ces chaussures « made in Nigeria » qui confisquent les étals. A la délégation régionale  du Commerce pour le Littoral, le délégué révèle qu’aucun chiffre sur la quantité de ces produits n’est disponible. Simon Omgba Belinga, soutient d’ailleurs que « notre intérêt n’y est pas, car ce ne sont pas des produits de premières nécessités », souligne-t-il. Pourtant, « il est impossible d’aller dans un ménage sans trouver une paire de ces babouches », s’indigne un membre de l’association de la Chambre nationale des consommateurs du Cameroun (Cnacoc).  Et, d’après certains cadres à la délégation du Commerce, plusieurs de ces chaussures « entrent même frauduleusement dans les frontières du Cameroun ».
Un ressortissant Nigérian joint au téléphone, confie que le Cameroun est à 80% le principal client des artisans nigérians. Aucune entreprise locale camerounaise n’exerçe encore dans ce secteur.  Et, les prix de ces chaussures importées ne cessent d’augmenter, comme ceux des produits de premières nécessités. En effet, en moins de deux ans, le prix de ces tongs est passé de 350 à 500 FCFA voire 1000 FCFA. Les grossistes justifient cette hausse, par le coût élevé des taxes douanières qu’ils payent pour les transporter au Cameroun.
Christelle Kouétcha 

19 oct. 2014

Corruption en milieu scolaire: Le bon geste qui ouvre les portes

De nombreux élèves admis dans les lycées et collèges l’ont été contre des pots de vin. Ici, la corruption fonctionne comme une filière organisée, où des dirigeants se servent des rabatteurs pour recruter.   
Bernard, nom d’emprunt, est aujourd’hui élève au lycée de Nyalla à Douala au Cameroun. Le jeune apprenant ignore que Joseph, son père, a dû se faire aider par un rabatteur et payer gros pour lui trouver cette place. «Monsieur, votre enfant ne peut plus être admis dans un lycée car il a un âge avancé ; donc vous allez me donner au moins 200 000 F cfa », lui avait conseillé le rabatteur. Après de multiples supplications, le parent réussira à faire accepter 150 000 F cfa, environ quatre fois plus cher que les frais exigibles pour la scolarité dans ce lycée.
Un réel motif de réjouissance pour ce parent.  « Si tu veux être sûr d’avoir une place dans un lycée à Douala, il faut toujours mouiller la barbe du proviseur, même si ton enfant est l’élève le plus brillant de la terre », fait-il remarquer. Une dame dont nous préférons taire le nom, soutient avoir déboursé 100 000 F cfa pour inscrire son enfant en classe de 6ème au lycée de Ndog-hem à Douala, où il n’avait pas eu le concours d’entrée.
 Business des proviseurs
Des rabatteurs s’occupent à chaque fois de la sale besogne pour le compte des chefs d’établissement qui, eux, redoutent des sanctions. Il faut alors débourser généralement  100 000 F cfa pour l’entrée en 6ème et les classes d’examen (3ème, 1ère et Terminale), 50 000 à 80 000 F cfa pour les autres classes en fonction de la demande et de la période.
A en croire un autre rabatteur, « En période de rentrée, les parents ont trop de problèmes et les exposent souvent autour d’un verre. La plupart des personnes que je cible sont des élèves qui ont l’âge dépassé ou qui ont été exclus du lycée ». Chez lui, le tarif est de 120 000 F cfa pour ces derniers cas et peut grimper jusqu’à 200 000 F cfa après le début des classes. Un enseignant explique que les chefs d’établissement évoquent à chaque fois l’absence de places encore disponibles. Du coup, « le parent déboussolé est souvent conduit par le complice du proviseur vers la personne qu’on appelle le "tuyau" ». Ce dernier fait très souvent partie du personnel de l’établissement.
Les chefs d’établissement cités nient tout en bloc. Surveillant général au Lycée de Nyalla, Joachim Epoh soutient plutôt que les parents se font arnaquer par des personnes externes à l’établissement. «L’administration ne peut pas permettre ce genre de choses, car notre rôle c’est d’éduquer. Il faut que les parents viennent poser leur problème au sein de l’établissement, au lieu de se laisser berner par des individus qui se prennent pour des enseignants ou des démarcheurs du lycée », soutient-il. Et pourtant, un enseignant de ce lycée confirme bien les pratiques de corruption qui y ont cours, en justifiant son implication : «Ce business est celui des proviseurs et de nous autres enseignants vacataires. Nous avons un salaire très bas et pour joindre les deux bouts, on est parfois amené à monnayer des places. Cela est communément appelé les "cas"», révèle-t-il. Pour nombre d’enseignants, la vente des places justifie les effectifs pléthoriques dans les lycées.

Concussion
A la commission nationale anti-corruption (Conac), ces actes sont qualifiés de «concussion». D’après le Code pénal, les responsables d’école dont la culpabilité est établie sont « punis d'un emprisonnement de deux à dix ans et d'une amende de 20 000 à 2 millions de F cfa ». Certains responsables d’école en ont déjà fait les frais. Dans le rapport 2011 de la Conac, l’on apprend par exemple que Lamba Léopold, alors surveillant Général au Lycée Bilingue d’Essos à Yaoundé, avait été relevé de ses fonctions le 09 novembre 2011. Motif : extorsion de 200 000 F cfa à un parent d’élève pour le recrutement de deux de ses enfants. L’année suivante, c’est un collaborateur du proviseur du lycée Bilingue d’Essos qui avait été relevé de ses fonctions, pour avoir  incité les parents d’un élève à payer de manière indue une somme de 100 000 F cfa.
Un cadre de la Conac condamne  beaucoup d’autres actes assimilés à de la corruption qui ont cours dans divers lycées et collèges : exiger aux parents  l’achat des tables bancs, des frais de livrets scolaires ou des cours d’informatique. En 2012, le proviseur Myriam Françoise Nga Edoa du Lycée Bilingue d’Ekorezock à Yaoundé avait été suspendu de ses fonctions pour ces raisons.

Abus de fonction
De l’avis  du juriste Roland Sandjo, les responsables d’établissement concernés s’exposent à des poursuites pour abus de fonction,  lequel est puni d’« un emprisonnement de trois mois à un an et d'une amende de 5 000 à 50 000 FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement». Cependant, précise Me Jean-Rameaux Tchokonté, puisque  l'infraction des responsables d’école est commise dans le but de se procurer ou de procurer à autrui un avantage quelconque, « les dispositions du Code pénal prévoient également contre ces derniers une peine d'emprisonnement de trois mois à trois ans et une amende de 50.000 à 1 million de F  cfa», précise l’avocat.
Christelle Kouétcha (JADE)

Encadré :
Le phénomène de vente des places dans les lycées et collèges
Selon une étude de l’ONG Zenü Network intitulée « La corruption dans le secteur de l’éducation », il ressort que le monnayage des places pour le recrutement des élèves occupe le haut du pavée de la corruption en milieu scolaire avec un taux de plus de 37 %. 
Dans cette étude publiée en 2012, l’ONG relève que plusieurs responsables d’établissement ont fait fortune à travers cette pratique. « Les victimes ne sont pas souvent promptes à dénoncer les directeurs d’école. C’est très souvent quand les résultats ne sont pas satisfaisants pour eux, qu’ils sont dans tous leurs états », soutient André Marie Ntamack, chercheur en éducation et sciences sociales.  Les parents qui se prêtent à ce jeu, parfois même par contrainte, ne sont pas moins complices. «Les parents prennent parfois l’initiative de corrompre le chef d’établissement, ceci en glissant une enveloppe dans le dossier de recrutement de l’enfant. Ils ne prennent même plus le temps de rencontrer le proviseur ou le directeur, ils recherchent activement les réseaux de recrutement, falsifient les bulletins et paient pour faire inscrire leurs enfants », dénonce Flaubert Djateng, Coordonnateur de Zenü Network.
C.K (JADE)
Les articles sont produits avec l'aide financière de l'Union Européenne à travers le PASC. Le contenu de ces articles relève de la seule responsabilité de JADE Cameroun et ne peut en aucun cas être considéré comme reflétant la position de l'Union Européenne.

Cameroun-Nigéria: La diminution des ressources ralentit la démarcation des frontières

La commission mixte  qui supervise ces travaux tend la main à la communauté internationale pour une assistance.
La démarcation menacée pas les finances
Les travaux de démarcation de la frontière entre le Cameroun et le Nigéria, est sur le point de sans doute tourner au ralenti. En effet, d’après la Commission mixte Cameroun-Nigeria mise en place pour superviser ces travaux, les ressources du fonds d’affectation spéciale ont connu une diminution. Les responsables de cette commission, l’on fait savoir au cours d’une réunion extraordinaire, qui s’est tenue à Yaoundé, le samedi 11 octobre 2014. Cette commission mixte, avait été créée en application du communiqué conjoint du 15 novembre 2002 à Genève(Suisse), dans le cadre du règlement du différend qui opposait les deux pays frontaliers au niveau de la péninsule de Bakassi.
Dans le communiqué de la rencontre rendu public sur le site internet d’African Press Organisation (APO), l’on apprend que la commission ne compte désormais plus que sur la communauté internationale, à qui elle a lancé un appel pour qu’elle apporte son assistance aux Parties. Celle-ci, devrait permettre à la commission de parachever les travaux de démarcation. Ces travaux engagés depuis plusieurs années, a déjà permis la pose de 289 nouvelles bornes frontières, a révélé la commission dans le communiqué. Ces bornes concernent les contrats relatifs aux lots 1 et 2, clôturés le 06 juin 2014.
La suite de ces travaux de démarcation, vont se faire sans Président de la Commission mixte, l’Ambassadeur Saïd Djinnit.  Ce dernier, ayant été appelé à d’autres fonctions, apprend-on. Les Chefs de la délégation de la commission-mixte, ont également profité de cette rencontre pour condamner avec « la plus grande fermeté » les activités terroristes qui détruisent les modes d’existence des personnes vivant dans la partie nord de la frontière terrestre entre le Cameroun et le Nigeria. Surtout, que ces actes terroristes menés par la secte islamistes Boko Haram, ont un impact négatif sur les activités de démarcation, apprend-on. Il faut rappeler qu’au cours du sommet tripartite de Genève entre Paul Biya, président de la république du Cameroun, Olusegun Obasanjo, alors Président de la République fédérale du Nigeria, et Kofi Annan, ancien Secrétaire général des Nations Unies, les deux Chefs d’Etat avaient renouvelé leur  engagement de renoncer à l’usage de la force dans leurs relations bilatérales et de rechercher des moyens pacifiques pour régler leur différend frontalier.
Christelle Kouétcha

Port de douala : Un projet d'achat de quatre sacnners aux oubliettes



Annoncé depuis 2008, ce projet tarde à prendre corps, au grand dam de cette structure qui ne dispose que d’un seul scanner actuellement.

2008-2014, ça fait déjà 6 ans, que, Essimi Menye, l’ex ministre des Finances, a annoncé en grande pompe, le projet d’installation de 3 à 4 scanners au port de Douala. C’était au mois d’août de l’année 2008, au cours d’une de ses visites au Port autonome de Douala (PAD). Resté sur cet effet d’annonce, le projet n’a toujours pas connu son aboutissement. Au ministère des Finances (Minfi), des responsables joints au téléphone, disent même ne pas être au courant dudit projet.
Même son de cloche à la direction générale de la Douane (DGD). Des cadres rencontrés, sont restés surpris d’apprendre l’existence d’un tel projet. Pour d’autres informés, « le dossier est sans doute entre le Minfi ou la primature », a indiqué un cadre de cette institution. Ces scanners annoncés, devait en principe être opérationnels en décembre 2008 avant le début du prochain exercice budgétaire de cette année là, apprend-on dans une dépêche de l’Agence de presse africaine (APA). Le financement de ce projet, était évalué à hauteur de  8 milliards de FCFA, à l’époque.
La matérialisation de ces scanners n’a toujours pas vu le jour. Et, jusqu’à présent, le port de Douala ne fonctionne qu’avec un seul scanner. Un équipement qui connait souvent des pannes et paralyse même les activités portuaires.  En 2012, cette panne avait duré plus de trois semaines. Bien plus, avec un seul scanner  installé à la fin de la chaîne de dédouanement, « les conteneurs mettent parfois trois jours pour passer. Et, si d’aventure votre conteneur est déclaré suspect, il doit être déchargé engendrant des dépenses supplémentaires », avait indiqué, Gabriel Manimben, Administrateur directeur général de l’Agence des prestations maritimes (APM)  dans un entretien accordé au magazine « Itinéraire ». 
Et, d’après les importateurs, avec un seul scanner, les conteneurs en transit échappent au contrôle. Une situation dangereux, car « certaines personnes peuvent profiter de cette situation pour faire circuler facilement les armes, et d’autres produits illicites », relève Athanase Essomba, importateur. D’après ce dernier,  la mise en place d’autres scanners pourrait faciliter un scannage à 100% en amont, c’est-à-dire dans les portiques.  En tout cas, si le projet des scanners est réalisé,  cela pourrait faire du port de Douala, « un organisme pouvant rivaliser avec les autres ports du golfe de Guinée », avait souligné Jean Marcel Dayas Mounoume l’ex Dg du Port lors de la visite de l’ex-Minfi au PAD en 2008.
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Christelle Kouétcha  

8 oct. 2014

Thierry Tené: « La faiblesse des Pme africaines est dû à l’abandon de la RSE »

Le Co-fondateur de l'Institut Afrique RSE donne l’importance de l’application de ces principes dans pour les entreprises.
Thierry Téné
Qu'est ce qui peut expliquer que la notion de la responsabilité sociétale des entreprises (Rse) soit de plus en plus utilisée aujourd'hui?
Plusieurs raisons peuvent expliquer l’émergence de la RSE. La première est la mondialisation. En effet, dans une économie globalisée et fortement concurrentielle, il faut se distinguer avec d’autres critères que le prix. La RSE permet de mettre en exergue des valeurs éthiques, citoyennes et humanistes. L’autre raison est la forte attente des consommateurs sur les engagements sociaux et environnementaux des entreprises. Les actionnaires aussi poussent les sociétés dans lesquels ils investissent à mettre en œuvre les stratégies RSE pour anticiper d’éventuels risques. En Afrique, la classe moyenne est de plus en plus regardante des engagements sociaux et environnementaux des entreprises. Les pays occidentaux et émergents à travers les mécanismes comme les Principes Directeurs de l’OCDE à destination des multinationales poussent leurs entreprises transnationales à intégrer la RSE y compris dans leurs filiales à l’étranger. Les bailleurs de fonds sont également dans cette dynamique. C’est la convergence de tous ces facteurs qui expliquent ce mouvement de fond car la RSE est devenu un outil de compétitivité.
Qu'est ce que l'entreprise gagne en mettant en œuvre la RSE?
D’un point de vue environnemental, il y a un couplage fondamental entre l’environnement et la performance économique de l’entreprise. En effet, au cours du process l’entreprise utilise la matière première qui est transformée grâce à l’énergie pour obtenir des produits finis ou semis finis. Au cours du cycle industriel, il y a la production des déchets. Si dans une stratégie environnementale ambitieuse, l’industrie internalise, ces externalités externes, elle va obtenir des gains économiques. Ceci grâce à l’efficacité énergétique et à l’optimisation du process car il rejette moins de déchet.. On pourrait faire la même démonstration avec le social. Une entreprise qui propose de meilleures conditions de travail aux salariés, est soucieuse de leur cadre de vie et de tous les problèmes de ces derniers, vas y gagner. Les employés auront le sentiment de recevabilité et seront de ce fait plus productifs. C’est aussi le cas pour le partage des richesses aussi bien avec les salariés qu’avec les communautés locales. Une entreprise ne peut pas être un îlot de richesse dans un océan de pauvreté. Cette situation ne peut pas tenir à moyen terme et va se retourner contre elle.
La mise en place de la RSE demande sans doute la mobilisation des coûts financiers, est-ce que toutes les entreprises, particulièrement les PME sont capables d'implémenter la RSE ?
Avant de parler des coûts de la RSE, parlons du coût de la non RSE. Quand une entreprise pollue un site industriel ou un cours d’eau, il ne faut pas se faire d’illusion, quelque soit le temps que cela va prendre, il faudra bien un jour dépolluer le site. Plus le délai est long plus la facture sera élevée. Quand il n’y a plus de poissons à certains endroits du Wouri à cause de la pollution industrielle, à combien on évalue les conséquences économiques, sociales, environnementales et même culturelles ? Les PME africaines ne sont pas performantes parce qu’elles délaissent la RSE. Vous savez la perte financière que coûte un accident de travail à une PME ? Or un bon Système de Management Sécurité, Qualité et Environnement aurait permis d’anticiper. De plus elles sont très nombreuses ces PME camerounaises et africaines qui n’accèdent pas à certains marchés parce qu’elles n’ont pas de reporting RSE.
Quels sont les problèmes essentiels qui peuvent être liés à la mise en œuvre de la RSE?
L’année dernière, en prélude de la première édition du forum international des pionniers de la RSE en Afrique que le Groupement Inter-Patronal du Cameroun (GICAM) et l’Institut Afrique RSE ont organisé à Douala, nous avons justement réalisé une enquête sur les contraintes de l’implémentation de la RSE en Afrique. Il y a trois raisons principales : l’absence de politiques publiques sur la RSE, le manque de compétences et de ressources humaines et enfin l’absence de reconnaissance et de valorisation des entreprises exemplaires.
Dans quelle mesure l'Etat peut-il imposer la RSE aux entreprises?
Je ne reprendrai pas le mot « imposer ». Les Etats africains doivent concevoir les politiques publiques de RSE dans une logique Win-Win. En effet, les gouvernements africains n’ont ni les moyens financiers ni humains pour contrôler l’application de la loi dans toutes les entreprises. Dans le même temps, les entreprises jouent parfois le rôle de l’Etat en réalisant des projets dans les domaines régaliens comme la santé et l’éducation. Nous militons donc pour un partenariat public privé avec pour dénominateur commun la RSE. Ce qui permet à l’Etat de répondre aux besoins des populations et aux entreprises qui mettent en place des initiatives sociales, environnementales et économiques remarquables d’être reconnues. L’Etat peut aussi utiliser le levier de la commande public pour exiger la prise en compte de la RSE dans les appels d’offres. Tout ceci nécessite la formation des cadres et un important travail en amont.
Propos recueillis par Christelle Kouétcha


RSE: Le dilemme de la conciliation croissance et environnement

La prise en compte des préoccupations environnementales sont plutôt bénéfiques pour les entreprises.
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Concilier la croissance de l’entreprise et les préoccupations environnementales, n’est pas la chose la mieux partagée dans plusieurs entreprises au Cameroun. En effet, la responsabilité environnementale qui exige de l’entreprise de respecter la réglementation environnementale en vigueur, n’est « malheureusement », pas encore « ancrée dans les mœurs des entreprises au Cameroun », fait observer Thierry Tené, Co-fondateur de l'Institut Afrique RSE. Aujourd’hui, au Cameroun les démarches semblent être « lentes », on observe encore dans les métropoles des sites industriels orchestrant des grandes pollutions. En avril dernier le Ministère Camerounais de l’Environnement de la Protection de la Nature et du Développement Durable avait publié une liste de 139 installations qui étaient en infraction par rapport à certaines dispositions de la loi N°96/12 du 5 août 1996 portant sur la loi-cadre relative à la gestion de l’environnement. Une bonne chose sur le principe. Mais « quand on regarde les montants des dites sanctions, qui sont insignifiantes par rapport aux dégâts écologiques, on se dit qu’il y a un gros problème avec la loi environnementale au Cameroun », fait observer Thiery Téné. Ainsi, polluer revient moins cher que de respecter l’environnement en faisant des investissements plus élevés.
La responsabilité environnementale de l’entreprise, sollicite donc la mise en place d’une une stratégie environnementale ambitieuse, qui permettrons de réduire les impacts des activités de l’entreprise sur l’environnement. Selon les experts, l'intégration de l'environnement au sein de l'entreprise peut se faire de façon progressive Dans un premier temps, l'entreprise peut mettre en place de bonnes pratiques pour réduire son impact sur l'environnement. Si l'entreprise souhaite s'impliquer davantage, elle peut intégrer la gestion de l'environnement dans son système de management en mettant en place un "système de management de l'environnement" (SME). Une fois le système mis en place, l'entreprise pourra faire reconnaître son Sme par une certification, c'est à dire obtenir la reconnaissance de sa conformité avec la norme internationale ISO 14001.
Le Système de management environnemental, permet d’améliorer en continue la performance environnementale de l’entreprise. Le management environnemental peut être répercuté sur le site de l’exploitation du produit et sur le produit même. Ainsi, sur le produit le Sme prend en compte toutes les étapes du cycle de vie du produit, "du berceau à la tombe". Sur le site de production, l'entreprise peut ainsi prendre des mesures pour réduire son impact sur l'environnement en prévenant et limitant la production des déchets, triant ses déchets, utilisant des matériaux recyclables, réduisant sa consommation d'eau et d'énergie, réduisant ses émissions polluantes grâce, par exemple, à la mise en place de technologies propres.
Des actions favorables, surtout que l’intégration des préoccupations environnementales dans la gestion de l’entreprise  est un business particulièrement rentable pour les entreprises africaines. En effet, l’Onudi a récemment mené un projet intéressant dans trois pays d’Afrique du Nord (Maroc, Egypte et Tunisie). Grâce à un investissement de 20 millions de dollars (10 milliards de Fcfa) dans 43 industries afin de limiter leurs impacts environnementaux, le résultat est spectaculaire. Les entreprises réalisent chaque année une économie de 17 millions de dollars (340 millions de Fcfa), elles économisent 9,7 millions de mètres cubes d’eau et 263 GW d’énergie par an.
Néanmoins pour le respect de l’environnement,  le législateur peut faire pression sur les entreprises à travers, par exemple le principe « Pollueur-Payeur ». Il consiste à  imputer le traitement des dégâts environnementaux à l’entité qui est à l’origine de cette dégradation. Mais, « Sur le papier c’est très bien, encore faut-il que la loi soit adaptée », précise l’expert. En plus le gouvernement «  ne dispose pas souvent des moyens financiers, humains pour contrôler l’application de la loi dans toutes les entreprises », fait observer l’expert.  Les consommateurs ont également un rôle à jouer, et peuvent constituer un levier important pour faire pression sur l’entreprise afin qu’elle remplisse ces obligations écologiques. « Si le consommateur privilégie l’achat des produits plus respectueux de l’environnement, il va influer sur les industriels », conclut Thiery Téné.

Christelle Kouétcha