5 mai 2014

Projet Herakles Farms: une redevance foncière très contestée

Les populations se disent perdantes et craignent une aggravation de la pauvreté.

Les populations vont être convertis en prolétaire agricole
Sur 260 milliards de FCFA que va investir la société américaine Herakles Farms dans la région du Sud-Ouest, l’entreprise doit reverser au trésor public, 198 millions de FCFA de redevance foncière (RF). Ceci, pendant les 3 ans d’exploitation provisoire accordé par le président de la République du Cameroun. Cette redevance, comme l’indique les acteurs de la société civile,  est largement insuffisante et n’aura pas une grande contribution au budget de l’Etat. Au sein de l’ONG, Réseau de lutte contre la faim (Relufa), le calcul est d’ailleurs déjà fait. Le coordonnateur, Jaff Bamendjo, relève que lorsqu’on divise le montant total de la redevance foncière que doit verser la compagnie à l’Etat du Cameroun par le nombre de superficie totale, le loyer annuel de la terre revient à 10 000 FCFA/ ha/ an. Pourtant, dans plusieurs régions agricoles comme Njombé, les paysans paient un loyer d’environ 100 000 FCFA par hectare par an aux propriétaires privés.
Dans les villages, les agriculteurs voient en la RF, « une braderie foncière », car la redevance perçue « n’atteint même pas le chiffre d’affaire qu’une seule association d’agriculteurs peut gagner dans le Sud-Ouest », relève Bonaventure Ekoko, propriétaires de 20 ha de terre. Les terres des membres de l’association des agriculteurs du village de Fabe par exemple, cédées à Sgsoc, permettaient à ces agriculteurs de récolter près de 5000 tonnes de cacao par an. Ceci, pour un bénéfice d’au moins 10 millions de FCFA par an. Par ailleurs, les habitants restent encore perplexes, quant-à la répartition de la redevance foncière. « Nous sommes plusieurs villages concernés, mais personne ne connais le montant de sa contrepartie et éventuellement les projets qui vont  être affectés par cette redevance », s’indigne Thomas Langason, président des jeunes de Mayemen.
Comme lui, plusieurs élites de la région du Sud-Ouest sont convaincues que le loyer des terres ne sera pas reversé pour le développement des villages. « Sgsoc n’est pas la première entreprise qui exploite nos terres pour le palmier à huile, et payent des loyers. Mais, on ne voit pas un seul projet qui a été financé par ces loyers. Nos routes sont embourbées et nous n’avons pas d’électricité », s’indigne Marc Antoine Enang, habitant de Mudemba. Le Sud-Ouest est déjà entouré de plusieurs entreprises de palmiers à huile, tels que Pamol, CDC…
Comparant le prix du loyer avec d’autres compagnies comme Biopalm (Une entreprise qui a pour projet de mettre en œuvre une plantation de palmiers à huile dans le département de l’Océan qui a reçu un bail provisoire en 2012 Ndlr) qui doit verser 150 000 FCFA/ha  de loyer, Brendan Schwartz, chargé de campagne à Greenpeace Africa, estime que le prix du loyer d’herakles Farms, n’est pas équitable vis-à-vis de la valeur de la terre et le préjudice subi par les populations riveraines. « Le prix du loyer reste très dérisoire : 3,333 FCFA/ha, pour une terre que la société estime être 3 millions de FCFA l’hectare. Pourtant, la loi Camerounaise prévoit que 40% de la redevance foncière soit cédée aux communes concernées et 20% aux communautés riveraines », précise-t-il. On peut donc se demander, pourquoi est-ce que le prix du loyer d’Herakles est seulement 3,333 FCFA/ha ? En tout cas, le décret du président n’a pas répondu à cette question. Et encore moins, sur ce que va devenir le bois qui proviendra du défrichage de la forêt. Surtout que Herakles a été récemment sanctionné par l’Observateur Independant des forêts pour exploitation illégale.

Christelle Kouétcha

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