Les populations se disent perdantes et
craignent une aggravation de la pauvreté.
Les populations vont être convertis en prolétaire agricole |
Sur 260 milliards de FCFA que va investir
la société américaine Herakles Farms dans la région du Sud-Ouest, l’entreprise
doit reverser au trésor public, 198 millions de FCFA de redevance foncière
(RF). Ceci, pendant les 3 ans d’exploitation provisoire accordé par le
président de la République du Cameroun. Cette redevance, comme l’indique les
acteurs de la société civile, est largement insuffisante et n’aura pas
une grande contribution au budget de l’Etat. Au sein de l’ONG, Réseau de lutte
contre la faim (Relufa), le calcul est d’ailleurs déjà fait. Le coordonnateur,
Jaff Bamendjo, relève que lorsqu’on divise le montant total de la redevance
foncière que doit verser la compagnie à l’Etat du Cameroun par le nombre de
superficie totale, le loyer annuel de la terre revient à 10 000 FCFA/ ha/ an.
Pourtant, dans plusieurs régions agricoles comme Njombé, les paysans paient un
loyer d’environ 100 000 FCFA par hectare par an aux propriétaires privés.
Dans les villages, les agriculteurs voient
en la RF, « une braderie foncière », car la redevance perçue
« n’atteint même pas le chiffre d’affaire qu’une seule association
d’agriculteurs peut gagner dans le Sud-Ouest », relève Bonaventure Ekoko,
propriétaires de 20 ha de terre. Les terres des membres de l’association des
agriculteurs du village de Fabe par exemple, cédées à Sgsoc, permettaient à ces
agriculteurs de récolter près de 5000 tonnes de cacao par an. Ceci, pour un
bénéfice d’au moins 10 millions de FCFA par an. Par ailleurs, les habitants
restent encore perplexes, quant-à la répartition de la redevance foncière.
« Nous sommes plusieurs villages concernés, mais personne ne connais le
montant de sa contrepartie et éventuellement les projets qui vont être
affectés par cette redevance », s’indigne Thomas Langason, président
des jeunes de Mayemen.
Comme lui, plusieurs élites de la région
du Sud-Ouest sont convaincues que le loyer des terres ne sera pas reversé pour
le développement des villages. « Sgsoc n’est pas la première entreprise
qui exploite nos terres pour le palmier à huile, et payent des loyers. Mais, on
ne voit pas un seul projet qui a été financé par ces loyers. Nos routes sont
embourbées et nous n’avons pas d’électricité », s’indigne Marc Antoine
Enang, habitant de Mudemba. Le Sud-Ouest est déjà entouré de plusieurs
entreprises de palmiers à huile, tels que Pamol, CDC…
Comparant le prix du loyer avec d’autres
compagnies comme Biopalm (Une entreprise qui a pour projet de mettre en œuvre
une plantation de palmiers à huile dans le département de l’Océan qui a reçu un
bail provisoire en 2012 Ndlr) qui doit verser 150 000 FCFA/ha de
loyer, Brendan Schwartz, chargé de campagne à Greenpeace Africa, estime que le
prix du loyer d’herakles Farms, n’est pas équitable vis-à-vis de la valeur de
la terre et le préjudice subi par les populations riveraines. « Le prix
du loyer reste très dérisoire : 3,333 FCFA/ha, pour une terre que la société
estime être 3 millions de FCFA l’hectare. Pourtant, la loi Camerounaise prévoit
que 40% de la redevance foncière soit cédée aux communes concernées et 20% aux
communautés riveraines », précise-t-il. On peut donc se demander,
pourquoi est-ce que le prix du loyer d’Herakles est seulement 3,333 FCFA/ha ?
En tout cas, le décret du président n’a pas répondu à cette question. Et encore
moins, sur ce que va devenir le bois qui proviendra du défrichage de la forêt.
Surtout que Herakles a été récemment sanctionné par l’Observateur Independant
des forêts pour exploitation illégale.
Christelle Kouétcha
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