Les grandes structures en charge du
transfert d’argent bénéficient d’une clause d’exclusivité, avec pour
conséquence la cherté des coûts d’envois. C’est ce qui ressort d’un atelier
organisé la semaine dernière à Douala.
Le constat
est fait. Les transferts d’argent des Camerounais de la diaspora vers le
Cameroun coûtent cher. Représentant-résident de la Banque africaine de
développement (BAD) au Cameroun, Racine Kane, relève par exemple que les
commissions prélevées par les intermédiaires financiers, sont aujourd’hui
estimées entre 10% et 15% du montant envoyé. Ce coût est lié entre autres à la
manipulation des espèces et des rentes de situation, précise Racine Kane. L’on
assiste donc de plus en plus au recours à des réseaux parallèles informels et
peu sûrs.
Directeur
général adjoint de l’Agence française de développement (AFD) au Cameroun,
Martin Parent, confie que près de la moitié des transferts des migrants
camerounais est faite dans l’informel et le poids des commerçants y est plus
grand. Par conséquent le manque à gagner pour les migrants et partant pour le
développement est important. Il faut donc baisser les coûts, pensent les
experts. Car, ces transferts représentent des sommes considérables. Selon une
estimation de la banque mondiale, les transferts des migrants représentaient
une somme de 406 milliards de dollars (203 000 milliards de FCFA) pour
l’ensemble des pays en développement en 2012.
Une étude
réalisée par l’ONG Epargne sans frontière (ESF), a donc été menée sur la
réduction des coûts de transferts des migrants, pour optimiser leur impact sur
le développement. Les travaux de cette étude ont été cofinancés par l’AFD et la
BAD. Selon l’étude, la baisse des coûts des transferts ne peut être obtenue que
par la seule levée de la clause d’exclusivité (contrat de distribution
octroyant l’exclusivité des produits de transfert d’argent rapide). Directeur
de cette ONG, Saïd Boujij, explique que les majors dans les sociétés de
transferts d’argent (STA) tels que Western Union et Money Gram imposent en
particulier à la plupart des agents et sous-agents cette règle, de même qu’une
clef de répartition des commissions de transfert.
Toutefois,
il faut relever que pour l’heure la question de la levée de la clause
d’exclusivité n’est pas envisagée par la BEAC. Pourtant, « elle
est de première importance tant pour les agents chargés de paiement, que pour
les envoyeurs et les bénéficiaires des transferts, car la levée crée une scène
de concurrence », précise Narceur Bourenane, expert à ESF. Ce
dernier révèle d’ailleurs que la suspension de cette clause se trouve
conditionnée par la diversification des services et des produits financiers et
technologiques d’appel, susceptibles de mieux répondre aux attentes des
migrants et des bénéficiaires. Les pays comme le Sénégal et le Maroc, à travers
leurs ministères des Finances et leurs banques centrales, ont levé ces clauses
d’exclusivité, sur le fondement des droits communs visant les entraves à la
concurrence. A en croire le représentant-résident de la BAD, cette levée a
ouvert la concurrence et baissé les coûts d’envoi dans ces pays.
Dans une
étude de la BAD en 2008, intitulé « Migrations, un enjeu de
développement », L'on a appris qu’en 2008, les envois d’argent ont
contribué à plus de 75% à financer les besoins de populations vivant à la
limite du seuil de pauvreté. Malheureusement, dans les banques camerounaises,
apprend-on, les services offerts aux immigrants sont encore couteux et pas très
avantageux. En effet, au Cameroun les comptes de résidents offerts par les
banques ne permettent pas aux résidents de contracter des prêts au Nord pour
des opérations au pays. Ceci limite donc les opérations d’épargne et
d’investissement des résidents à l’étranger. Des responsables de banques
confient que le plus souvent, les filiales européennes sont très réticentes
quand il s’agit de sécuriser les flux des migrants sur une longue période. Les
banques occidentales ne veulent donc pas jouer le rôle de collecteur. En plus,
le coût du Swift (opérations de transfert interbancaire sécurisé mis en place
par la Society for worldwide Interbank financial télécommunications Ndlr) reste
souvent supérieur à celui du transfert rapide offert par les sociétés de
transfert d’argent.
Réglementation
Les
capitaux à 85% destinés à la consommation échappent également au contrôle des
institutions bancaires. Des envois qui, selon les experts de l’étude, peuvent
contribuer au développement des pays s’ils étaient maîtrisés. Ceci a appelé à
la promotion d’autres modes de transferts qui incluent la bibancarisation et le
mobile banking. Surtout que les envois d’argent vont grandissants dans la zone
Cemac. Selon les statistiques relevées dans le rapport soutenu par la BAD, les
envois d’argent au Cameroun sont passés de 30 millions de dollars (soit
15 000 milliards de FCFA) en 2000 à 121 millions de dollars
(60 500 milliards de FCFA) 2011.
Si
l’objectif de la baisse des coûts de transferts à 5% à l’horizon 2014
(recommandations du G8 Ndlr) est atteint, « les envois vont
considérablement augmenter et les projets de développement seront étendus par
la diaspora si les institutions bancaires offrent des produits
favorables », précise Racine Kane, Représentant résident de la
BAD. Il précise par exemple qu’au Maroc où des mesures ont été prises pour
réduire les coûts des transferts, les envois du résident représentent 20% du
total des dépôts des banques.
La
réduction des coûts de transferts des migrants implique également une
intervention des autorités compétentes aux deux bouts de la chaîne des
transferts. Directeur général du Trésor, Moh Tangongho, confie que le
gouvernement pourrait, sans doute dans les jours à venir, créer des
établissements spécialisés pour canaliser les envois de la diaspora. Bien avant,
L'on a appris que le Conseil national du crédit (CNC) dispose déjà d’un bureau à
Paris en France, pour sécuriser les épargnes des résidents. Mais, « l’engouement
n’y est pas encore faute de services innovants », observe
Benedict Belibi, Secrétaire général de l’Association des professionnels des
établissements de crédits du Cameroun (Apeccam).
Christelle
Kouétcha
Au sein même de la Cémac, certains pays freinent des quatre fers le transfert d'argent. C'est le cas de la GE qui rechignent à accorder une autorisation à Express Union, pourtant leader de la sous-région dans le transfert d'argent.
RépondreSupprimerc'est un sujet qui mérite une véritable action de plaidoyer pour qu'on puisse arriver à un résultat probant !
RépondreSupprimerMerciii pour les chiffres. Le problème est sérieux et mérite que les autorités s'y attardent.
RépondreSupprimerMerciiii pour les chiffres surtout la go. ça témoigne de l'importance du problème. Les autorités compétentes devraient prendre à bras le corps la question car les transferts d'argent des migrants ont une valeur capitale dans l'économie des pays africains, et donc du Cameroun.
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