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5 avr. 2013

Dr Joël Beassem : « Les torréfacteurs de la Ceaac ne sont pas prêts pour le marché international »


Le chargé de l’agriculture et du développement rural à la Ceeac dévoile les contours de la stratégie d’intervention de l’organisme dans le secteur café.

La Ceeac a mis en place un projet d’intervention dans la filière café, en quoi consiste cette stratégie ?

La stratégie d’intervention de la Ceeac dans le secteur café a été élaborée sur la base d’un constat. Bien que le café soit une filière phare dans l’économie de nos Etats, il connaît un réel problème au niveau de sa production. La qualité et la compétitivité du produit sur le marché régional et international font également face à d’énormes difficultés. Le café produit par les Etats n’a pas assez de visibilité. La Ceeac a donc élaboré un document de stratégie régional pour booster cette filière. La réunion de Douala a donc abouti à l’adoption de ce document. Dans le document, il est recommandé à tous les Etats de mettre en place, au niveau national, des comités nationaux qui assureront le suivi de la filière. Au niveau régional, un cadre permanent de concertation devra être mis en place. Chaque Etat devra aussi avancer dans l’élaboration de son plan d’action avec des coûts et des échéances précis pour mobiliser les ressources et relancer la filière, aussi bien au niveau de la production, de la transformation que de la commercialisation.  La demande du produit est grande ; mais l’offre ne suit pas. Il faut donc relancer la production, surtout qu’au niveau des pays émergents, le pouvoir d’achat s’est amélioré et la demande croît.

Qu’est-ce qui faut concrètement pour améliorer la situation de la filière café ?

La relance de la production du café dans la région, passera entre autre par la redynamisation de la recherche et l’appui aux producteurs. Les Etats doivent mettre en place des stratégies nationales pour offrir aux producteurs des intrants de qualité. Il faut également organiser les circuits de commercialisation et l’interprofession tant au niveau national qu’au niveau régional. Les caféiculteurs ont besoin d’accéder aux sources de financement, afin que leur production soit réalisée dans le respect des normes. En ce qui concerne la commercialisation, l’un des premiers obstacles dans la région est la libre circulation des biens et personnes qui reste encore difficile dans notre espace. Il est primordial qu’au cours de la mise en œuvre de la stratégie, l’on veille à ce que les Etats respectent leurs engagements. Ceci permettra aux producteurs de nouer des échanges gagnant - gagnant.

Comment appréciez-vous le niveau de transformation du café dans la région et est-ce que les torréfacteurs sont prêts à affronter le marché international ?

Il y a des niches de transformation de café dans la Ceeac, mais une bonne partie de la production brute est exportée vers l’Europe, les Etats-Unis et autres. Toutefois, pour encourager le secteur de la transformation, les Etats doivent mette en place des stratégies de sensibilisation pour encourager la consommation locale du café Afrique centrale. Cela permettra de soutenir les producteurs qui font face à la concurrence des cafés importés. Cependant, les torréfacteurs de la sous-région ne sont pas encore prêts pour approvisionner le marché international. Pour arriver au stade de la transformation des grands pays de production, il faut acquérir la technologie. Les cafés transformés au sein de  la Ceaac se heurtent encore au problème de labellisation exigé par le marché international. Il y a des normes que les cafés doivent respecter pour accéder aux consommateurs internationaux souvent plus exigeants que les consommateurs locaux.

Propos recueillis par C. K.


200 000 tonnes à augmenter sur la production

La Ceeac a élaboré un document de stratégie pour augmenter la quantité et la qualité du produit. 

Les acteurs de la filière café des Etats membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (Ceeac), se sont réunis à Douala pour valider un document stratégique pour le développement de la filière café. La réunion de validation s’est tenue du jeudi 4 au vendredi 5 avril 2013. Un évènement organisé par la Ceaac en partenariat avec le Centre du commerce international (ITC) et l’Agence canadienne de développement international (ACDI). Représentant du secrétaire général de la Ceeac, Carlos Bonfim explique que la stratégie d’intervention des pays permettra entre autre d’augmenter la production, d’améliorer la qualité et la compétitivité du café et de promouvoir le café de la région. Le projet d’intervention validé par les pays producteurs et consommateurs de la Ceeac qui devait s’étendre de 2011 à 2014, a été réaménagé de 2014 à 2018. 
Dans sa stratégie pour booster la production, la Ceeac encourage une meilleure intégration des jeunes au sein des systèmes de production agricole. Cette main d’œuvre pourrait être capitalisée dans une industrie de café, précise la Ceeac dans cette stratégie. Le coût de création de l’industrie est évalué à 500 millions d’euros (environ 328 milliards de FCFA). A en croire, Carlos Bonfim, directeur des politiques macroéconomiques du commerce et de l’industrie monétaire à la Ceeac, la mise en place de ces stratégies va permettre d’augmenter près de 200 000 tonnes de café sur la production, d’ici 10 ans. Soit une valeur globale estimée à près de 600 millions d’euros (393,5 milliards de FCFA).
En plus, la consommation domestique pourrait atteindre environ 10%. Et par ricochet, cela pourrait permettre de développer une industrie de torréfaction et de distribution d’une valeur d’environ 200 millions d’euros (131 milliards de FCFA).  Les exportations du café sur les marchés mondiaux pourraient atteindre 170.000 tonnes par an, pour une valeur de 340 millions d’euros (environ 223 milliards de FCFA).
La stratégie propose également comme activités prioritaires la production et la distribution du matériel végétal performant et la vulgarisation des bonnes pratiques agricoles. Pour ce faire, la Ceeac se propose entre autres de compiler les projets nationaux, d’organiser des rencontres entre producteurs, chercheurs et multiplicateurs. La stratégie met également l’accent sur l’accès aux informations. Chargé de l’agriculture et du développement rural à la Ceeac, Dr Joël Beassem explique que l’utilisation des outils de publication d’information comme Infoshare va permettre aux producteurs des Etats de travailler avec les intermédiaires financiers pour faciliter la mobilisation de financements adaptés à la caféiculture.
Avec cette politique commune qui cible l’augmentation de la production de café, la Ceeac estime que la capacité d’absorption du marché sous-régional pour l’importation de café torréfie serait de 10 000 tonnes de café torréfié. Pour une valeur d’exportation d’environ 60 millions d’euros (39,3 milliards de FCFA).
C. K.




La production du café en chute libre en Afrique centrale

Les pays membres de l’institution ont du mal à booster la filière et se heurtent à la concurrence du café importé.

Les exportations de café des Etats membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (Ceeac), est en chute libre. En effet, selon les statistiques relevées par la Ceeac dans son document de stratégie d’intervention dans le secteur du café, depuis plus de 20 ans, la quantité de café produite annuellement dans la région Ceeac a diminué d’un niveau d’environ 4 à 5 millions de sacs, soit de 240 000 à 300 000 tonnes. Directeur des politiques macroéconomiques du commerce et de l’industrie à la Ceeac, Carlos Bonfim, indique qu’il y a 35 ans, les exportations se chiffraient à près de 8 millions de sacs de café. Mais aujourd’hui, l’exportation ne vaut qu’environ 60 000 à 90 000 tonnes (1 à 1,5 million de sacs) ; soit une chute de 80%.
Cette descente « aux enfers » du café de la sous-région, s’explique entre autres par le vieillissement des vergers et des planteurs, les problèmes d’accès aux intrants de qualité, l’absence d’un dispositif de financement approprié, la faiblesse et l’insuffisance des organisations de producteurs, une libéralisation mal maîtrisée du secteur dans les différents Etats, le manque de matériel végétal performant… Ces problèmes handicapent de plus en plus la production des pays de la Ceeac. D’après les statistiques relevées sur le site TradeMap, entre 2007 et 2009 par exemple, la production annuelle du café du Cameroun est passée de 47 256 tonnes à 30 335 tonnes. Dans les pays victimes de conflit comme le Congo Brazzaville, la production est passée de 8 787 tonnes à 5 041 tonnes. Chargé de l’agriculture et du développement rural à la Ceeac, Dr Joël Beassem, explique que les conflits dans les pays ont entraîné la destruction des vergers et particulièrement les recherches engagées pour la production du café.
Ces faibles productions « ne permettent pas aux pays de la Ceeac de s’imposer sur le marché mondial », soutient Dr Joël Beassem. En effet, LQE a appris que les pays africains producteurs de café ont fourni environ 12% de l’offre mondiale du café et moins de 11%  des exportations mondiales pour la saison 2009 - 2010. Pourtant, dans les années 70 l’Afrique comptait pour 30% des exportations mondiales. Toutefois, les perspectives du marché international du café semblent plutôt bonnes à moyen terme. Car, l’organisation internationale du café estime qu’avec un taux annuel de croissance d’environ 2%, la consommation mondiale de café va atteindre 170 millions de sacs en 2020. Ceci, par rapport au 132 millions de sacs consommés en 2010. Le monde aura donc besoin de 30 à 40 millions de sacs supplémentaires dans les dix ans à venir.
La demande est donc forte. Ainsi, « il sera question pour les Etats de la Ceeac de développer des stratégies pour augmenter leur contribution au marché mondial », indique Carlos Bonfim. Bien avant, il faudra encourager la consommation locale. A en croire les experts de la Ceeac, moins de 50% de la production locale de café est consommée localement. Les pays ont même encore du mal à commercialiser leur produit entre eux. Chef d’agence de la société Uccao (Union centrale des coopératives agricoles de l’Ouest) spécialisée dans la production du café au Cameroun, Béatrice Mewabo, explique que l’entreprise s’est toujours heurtée à des tracasseries douanières multiples au cours des ventes dans la zone Ceeac.
Le même problème est relevé par la société Tsongo Kasereka (Tsokas) du Congo Brazzaville. Kisumba Kambale, le directeur général de l’entreprise fait remarquer que les producteurs des pays de la Ceeac vendent « facilement » leurs produits vers les pays de l’Afrique de l’Ouest par exemple. « Il y a un réel problème d’intégration dans la sous-région. En plus, les structures de café des pays ne travaillent pas en synergie. Par conséquent, ils ne peuvent pas avoir des informations sur les différents types de café proposés sur le marché », observe Kisumba Kambale. Mais, le véritable problème est que « la consommation du café n’est pas encore entrée dans les mœurs de la population », indique le chargé de l’agriculture et du développement rural à la Ceeac. Il n’existe donc pas d’activités promotionnelles du café de la région.
En plus, apprend-on, le café localement produit est très fortement concurrencée par le café importé de l’Europe et de l’Afrique du Sud. « La chaîne de valeur du café n’est pas très structurée dans la région. La production n’est pas stable et variée comme celle des pays européen », relève Carlos Bonfim. Les producteurs de la Ceeac excellent plutôt dans la vente du café brut. Le café torréfié localement a encore du mal à être vendu sur le marché européen. Il se heurte entre autres à la labellisation exigée par le marché mondial. LQE a appris auprès de la Ceeac que dans certains pays d’exportation du café, il existe des impôts sur le café torréfié, ce qui décourage les activités de transformation dans les pays d’origine.
Le directeur général de la société Tsokas souligne par ailleurs que les torréfacteurs de la Ceeac ont encore du mal à avoir la constance dans la production, car les pratiques ne sont pas normalisées. Les torréfacteurs sont donc pour la plupart des entreprises artisanales, où le marché principal est un marché populaire à un prix très bas. D’après les acteurs du secteur, la tendance peut être relevée si les Etats créent de petites niches de transformation et y accordent des investissements conséquents. Les experts de la Ceeac révèlent d’ailleurs que les Etats de la région  accordent moins de 5% de leur budget à l’agriculture.

Christelle Kouétcha