Le président du
Réseau des acteurs de la valorisation des déchets ménagers (Ravadem) propose
des solutions qui peuvent contribuer à booster le secteur de la collecte et du
recyclage des déchets plastiques.
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Martial Bella Oden |
Malgré
l’abondance des déchets plastiques dans la nature, le
secteur du recyclage reste embryonnaire au Cameroun, qu’est-ce qui
peut expliquer cette situation ?
L’un des
problèmes qui bloque l’évolution de ce secteur est le manque d’informations.
Vous savez, les gens investissent dans les secteurs qui sont déjà portés à la
base. Il y a très peu d’actes de capitalisation et de développement dans ce
secteur. Dans le cadre du recyclage des plastiques en pavé par exemple, on est
obligé de travailler avec les données de l’Ouganda, du Burkina Faso. Au
Cameroun il n’y a aucune donnée. Pourtant, s’il quelqu’un veut investir, il faut qu’il dispose des fiches
techniques qui décrivent le secteur, les conditions à remplir pour créer une
entreprises, les taxes qu’il doit payer en fonction de sa production. Il
faut informer davantage le public sur les
opportunités entrepreneuriales dans la valorisation des
déchets.
Plusieurs
projets d’enlèvement et de recyclage de déchets plastiques ont été lancés par
des entreprises sans réel succès, qu’est qui faudrait faire pour les
optimiser ?
Les entreprises
pollueuses, au lieu de passer par des campagnes, doivent plutôt appuyer les
acteurs de la collecte, sensibiliser les ménages. Une signature des
partenariats public-privés avec les communes d’arrondissement dans l’optique
d’optimiser leurs actions de collecte et pourquoi pas de traitement de déchets
plastiques. Or, si cela se limite seulement à une campagne médiatique ces
actions ne pourront pas être pérennes.
La responsabilité sociétale se
veut bien pensée, elle ne se limite pas seulement aux actions
publicitaires. Les actions doivent être durables impliquant les parties
prenantes, avec qui des conventions doivent être bien établies pour que chacun
connaisse le rôle qu’il a à jouer. Si les acteurs, les bénéficiaires, sont mis
à l’écart dans le secteur de la collecte et du recyclage des déchets
plastiques, les actions n’atteindront jamais les effets escomptés.
Aujourd’hui,
le secteur de la collecte est encore embryonnaire et ce sont les petits
collecteurs qui le dominent. Les petits collecteurs n’ont pas de moyens. En
plus, ils se disent pourquoi collecter les déchets de quelqu’un qui pollue et
qui doit normalement s’occuper de ces déchets alors que je ne reçois rien en
retour. Ainsi, je reste convaincu que si les entreprises qui sont
responsables de ces déchets, donnaient des appuis aux petits collecteurs déjà
installés pour récupérer leurs propres déchets dans la nature, les gens
pouvaient aisément les récupérer, et rentabiliser leurs actions en vendant ces
déchets ailleurs.
La demande en
déchets est forte à l’international, mais le Cameroun est à la traîne, qu’elle
mesure peut-on prendre pour booster ce secteur en devenir ?
La plupart des
partenaires européens qui sollicitent les déchets plastiques, veulent toujours
en grande quantité. Et l’on ne peut les avoir que si les collecteurs sont unis entre eux. Nous avons fait des
expériences, et on n’a jamais pu exporter au moins quatre containers, car les
collecteurs sont dispersés.
Avec la multiplicité des dépôts, le coût
d’enlèvement est plus élevé. Si on arrive à un regroupement, on peut négocier
des sites de stockage par commune qui ne seront plus dédiés à un seul individu
mais à un groupe d’entrepreneurs. Les sites de dépôt par quartier devraient faciliter la voie aux
éventuels partenaires de maîtriser où trouver facilement la matière première.
En plus de l’organisation des collecteurs, il faut qu’ils bénéficient d’un
accompagnement technique. L’accord d’un fonds d’enlèvement des déchets devaient
leur permettre d’accéder dans les zones où la société qui s’occupe de
l’enlèvement des déchets actuellement n’est pas accessible.
Le ministère en
charge de l’Environnement, pourrait mettre sur place un fonds vert qui permet
de financer ce type d’activité. L’Etat peut les accorder un permis
environnemental unique, vu le coût élevé de celui-ci. Bref, il faut que l’on
arrive à une fiscalité adapté aux activités des valorisations de déchets. Elle
peut-être proche de celle de l’agriculture, c’est-à-dire TVA et IS (impôts
sur les sociétés) nuls pour les produits qui sont issus de la
valorisation des déchets. Le secteur est pourvoyeur d’emploi.
Le gouvernement,
peut mettre en place des permis environnementaux gratuits au moins pour les
cinq premières années. Et, une fois ces structures bien développées on peut
maintenant aller vers des taxes. C’est un secteur à développer, et s’il n’est
pas fait il ne peut pas rapporter de l’argent à l’Etat. Il a donc intérêt à le
développer par des mesures incitatives, pour qu’à l’issue de 3 ou 4 ans ce
secteur bien organisé à travers un réseau crée des coopératives qui peuvent
payer des impôts.
Vous encouragez
les jeunes à s’intéresser au secteur de la valorisation des déchets, mais ne
faut-il pas une formation ?
Effectivement
au Ravadem, les acteurs réunis estiment qu’il faut introduire dans les
programmes des universités et centres professionnels des techniques appropriées
de valorisation de déchets, particulièrement, dans les filières liées à
l’environnement, le développement durable, hygiène et qualité...
Cette
formation doit aussi être intégrée dans les centres multifonctionnelles de
jeunesse. Il y'a aussi un problème de certification dans le domaine.
Il y a la certification dans le domaine de l’entreprenariat, la gestion, et
l’informatique, mais pas dans le domaine des techniques de valorisation des
déchets. Cela serait une bonne chose si l’on pouvait arriver à une
certification camerounaise dans ce domaine.
Le système de certification est
assez lourd, mais il est sérieux et cela va représenter une norme. Il faut
également un centre de recherche pour technologies innovantes.
Propos
recueillis par C.K.
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