La corruption, le
sous-emploi, la guerre contre Boko Haram sont entre autres éléments qui peuvent
limiter les chances des premiers "eurobonds" (emprunts obligataires
émis en Europe) du Cameroun.
Le mardi 10
février dernier, le président de la République a signé une lettre de mandat,
instruisant le ministre des Finances à mobiliser 750 milliards de FCFA, sur le
marché financier international. Cependant, pour certains économistes plusieurs
signaux sont défavorables pour encourager les investisseurs à souscrire à cette
émission internationale. Jean Beaudry Manguele, expert financier et spécialiste
des marchés de titres, explique que l’un des risques pays, qui peut contribuer à
l’échec de l’endettement du Cameroun sur le marché des titres, est sans aucun
doute le niveau de corruption observé dans les ministères. L’expert, relève que
les investisseurs des marchés internationaux auront du mal à faire confiance au
Cameroun « si les ministres qui sont censés utiliser l’emprunt sollicité à
l’international sont pour la plupart accusés de détournement ».
Alors, le
maintien de ces derniers au sein du gouvernement, constitue sans aucun doute,
un signal « négatif » pour les emprunteurs. « Les marchés internationaux,
contrairement à nos marchés nationaux et régionaux, sont très alertes par
rapport à ce genre de signaux. Il faut assainir les finances publiques et
poursuivre l’opération Epervier si l’on veut vraiment attirer les investisseurs
», soutient Maurice Kamgaing, expert financier.
Chômage
A côté de cette
corruption, les experts dans le domaine du marché financier estiment que le
niveau du chômage et du sous-emploi observé au Cameroun ne fait pas bonne
presse pour les investisseurs. Selon les statistiques de l’Institut national de
la statistique, le taux de chômage au Cameroun se situe à 13%, et celui du
sous-emploi à 78,5 %. Des chiffres plus élevés que ceux du Sénégal (12,2
% pour le chômage et 30% pour le sous-emploi) qui a réussi à lever sur le
marché international des « eurobonds » de 250 milliards de FCFA en 2014.
Bien plus, dans
son discours à la jeunesse le 11 février dernier, le président de la
République, Paul Biya, a formellement reconnu que la jeunesse formée dans les
écoles au Cameroun n’est pas outillée. « Un pays s’endette pour que les
générations futures s’occupent des remboursements. Et, maintenant que nos
générations futures ne sont pas bien formées ni techniquement outillées,
comment voulez-vous qu’ils travaillent efficacement pour assurer le
remboursement des dettes contractées ? Les investisseurs se demandent toujours
si le pays emprunteur possède une population qui peut travailler efficacement
pour le rembourser », explique Jacques Epée, expert financier.
Risque politique
Dans une des
publications sur sa page Facebook, l’économiste et ancien cadre du Fonds
monétaire international, Eugène Nyambal, estime en outre que dans le contexte
actuel de guerre contre Boko haram et la baisse des recettes de l’Etat, le
niveau de risque du Cameroun ne lui permet pas d’emprunter sur les marchés
internationaux à des conditions favorables. Et en plus, estime l’économiste et
homme politique, Franck Essi, les « eurobonds » du Cameroun sont menacés par le
risque politique. Ceci, notamment par « l’incertitude sur la succession du
président Paul Biya du fait de son âge et des conséquences néfastes que
pourraient entrainer sa disparition compte tenu des fragiles équilibres
ethniques et des tensions qui resurgissent à la faveur de ce conflit contre
Boko Haram », analyse-t-il.
Christelle
Kouétcha
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