9 avr. 2014

Appolinaire Balla Otou: « Les safaris utilisent les Baka »

Le chef de section faune et aires protégées à la délégation départementale de la faune et de la flore pour la Boumba et Ngoko explique comment les pygmées Baka sont utilisés par des braconniers

 Appolinaire Balla Otou
Qui sont les acteurs du braconnage dans la région de l’Est ?

Tout le monde est braconnier. Il n’y a pas de profil exact. Ça peut-être vous et moi. En fait, en analysant bien, le braconnage est l’une des conséquences de la pauvreté, et de la vie facile que certaines personnes recherchent.

Pour lutter contre le braconnage, il y a des interdictions d’entrer dans la forêt. Ce qui handicape les peuples autochtones comme les Baka…

Les études ont été menées en concertation avec les ONG locales et internationales, les représentants des riverains. Il y a eu des concertations avant le zonage. Ce n’était pas fait au hasard. Les restrictions qui ont été faites, visent à rendre certains espaces exploitables afin que des gens n’y collectent pas des revenus qui peuvent aider au développement et projets. Les Baka en bénéficient d’une façon ou d’une autre. Il y a des œuvres palpables partout où la zone est giboyeuse. Le zonage a tenu compte des Baka par rapport aux autres riverains. On interdit aux Baka d’entrer dans la forêt pendant les Safaris, car ils peuvent être atteints par une balle perdue. Le zonage, la chasse sportive créent des pressions sur leur mode de vie. Nous sommes encore en pourparlers sur certains parcs.

Mais qu’est ce qui explique que des safaris qui sont des étrangers ont des droits de chasser alors que les autochtones comme les Baka qui chassent pour leur alimentation ne peuvent pas le faire ?

Je ne peux pas répondre à votre question comme si c’était un débat. Je peux aller plus loin et vous dire que le Baka même c’est le premier braconnier ; car il maîtrise la forêt. Ainsi, quand quelqu’un s’accroche à  lui et lui demande de lui montrer le premier endroit où on peut trouver les éléphants, le Baka est le premier à prendre les devants. Il est le premier porteur de l’arme. Ce ne sont pas eux qui organisent le commerce de la viande de brousse, mais il participe en assistant généralement le braconnier à col blanc, qui peut être même un agent du MINFOF. Les safaris utilisent les Baka, car ils se disent qu’ils n’ont pas la possibilité de rendre compte de leur forfait à un moment ou à un autre. J’ai eu plusieurs cas dans mon département. J’ai été obligé de jouer parfois le rôle de juge et de défendeur. A priori le Baka ne consomme pas n’importe quel gibier. Si vous trouvez un Baka avec un gibier qui ne rentre pas dans sa consommation, c’est qu’il est au service des safaris. Par conséquent, il se livre à des abus.

Les Baka accusent WWF, l’un de vos collaborateurs, d’exercer des actes de répressions à leur égard…

Vous savez, dans cette zone, pour peu que vous soyez habillé en vert, on dit que vous travaillez pour WWF. Ce sont les agents du MINFOF qui font la répression. L’agent de WWF joue le rôle d’informateur. WWF vient en appui au MINFOF à travers des financements et des véhicules.


Propos recueillis par Christelle Kouétcha

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