La faible quantité produite est exportée vers les pays frontaliers, les agriculteurs se plaignent du coût du transport et du caractère informel de leur activité.
La production des arachides reste rudimentaire |
Depuis le début du mois de septembre, les ménagères ont la possibilité de consommer en grande quantité les arachides. En effet, depuis près d’une semaine le prix de cet oléagineux a considérablement baissé. Avant hier lundi, 03 septembre, les ménagères et les détaillants se bousculaient devant les hangars des grossistes au marché oignon, l’un des points de grand approvisionnement à Douala. Ismaël Youssoufa, grossiste confie que ses vingt sacs d’arachide ont déjà été raflés par les clients « l’arachide était trop cher le mois dernier. Maintenant que les revendeuses ont entendu que le prix a baissé, c’est chacun qui se précipitent ».
La baisse est perceptible sur les
différents types d’arachides présents sur les étals. Ainsi, les sacs de 50 Kg
d’arachide rouge ont subi une réduction de 5000 Fcfa. Ils sont donc
vendus actuellement à 45.000 Fcfa au lieu de 50.000 Fcfa, il y a deux mois. Les
vieux stocks très prisés par les fabricants de caramels, sont liquidés à 42.000
Fcfa voir 40.000 Fcfa. Au marché central, le sceau de 5 litres, qui s’écoulait
à 3200 Fcfa est laissé aux consommateurs à 3000 Fcfa. Ceux-ci peuvent
maintenant débourser 2000 Fcfa, pour acquérir un sceau d’arachides rouge
de 2,5 litres.
Les arachides tintés, prisés pour les
sauces sont également à la baisse. Les détaillants qui laissaient la boîte ou
l’assiette à 175 FCfa, il y a deux mois, l’écoulent désormais à 150 Fcfa, voir
125 Fcfa. Cette réduction sur la boite, est consécutive au prix
« abordable » des arachides sur le marché. Le sac de 50 Kg
d’arachides tintés est passé de 50.000 Fcfa à 43.000 Fcfa. Le sceau de 5 litres
qui était vendu à 3000 FCfa, se vend actuellement à 2800 Fcfa.
A en croire les commerçants, la clientèle
a sensiblement augmenté quelques jours après la baisse. « J’ai déjà
vendu la moitié de mes 50 Kg d’arachides en une semaine », indique
Thierry Tchaguen, détaillant au marché Congo. Il précise que les arachides
étaient chères il y a quelques mois car c’était la période de sémis des
agriculteurs. « C’est à partir du 15 mars que les producteurs mettent
les graines en terre. Ils font donc de grandes réserves pour les semences, ce
qui réduit la quantité destinée à la vente et augmente le coût »,
indique-t-il. Cependant, le prix des arachides non décortiquées, généralement
consommées bouillies grimpe sur le marché. Le sac de 50 Kg, est passé de 30.000
FCfa à 42.000 Fcfa. Les grossistes expliquent que les récoltes ont sensiblement
baissé.
Production
La production d’arachide au Cameroun,
évolue encore dans l’informel. Délégué régional de la chambre d’agriculture, de
pêche d’élevage et des forêts (Capef/Lt), Gilbert Konango, explique que les
producteurs de la filière arachide utilisent encore des méthodes rudimentaires
pour assurer la production. « La plupart des producteurs ne disposent
pas d’équipements pour le nettoyage ou la récolte. Ils utilisent très souvent
les mains pour le travail», explique l’expert, non sans préciser que la
revalorisation de la filière arachide dépend, en premier chef, d’une
organisation efficace et durable de la production de semences. Malheureusement,
il n’existe pas de structures performantes de multiplication et de distribution
de semences d’arachides au Cameroun.
Des cadres de l’Institut de Recherche
Agricole pour le Développement (Irad), confient qu’aucune étude n’a encore été
engagée pour la production des semences d’arachides. Les producteurs sont donc
obligés de prélever du sémis dans leur récolte. « Ces semences ne sont
pas de mauvaise qualité, mais la présence des nouvelles variétés pourraient
doubler la production », souligne Patrick Mbida, ingénieur agronome.
Selon des statistiques publiées par l’institut national de la statistique (Ins)
en 2010 et révélées dans l’annuaire statistique du Cameroun, la
production d’arachide au Cameroun est passée de 253953 tonnes en 2005 à
484199 tonnes en 2008.
A en croire les opérateurs du secteur, des
« quantités non négligeables » de la production d’arachide sont
écoulées vers les pays frontaliers. Il s’agit notamment, du Gabon, de la Guinée
Equatoriale, du Nigéria, du Tchad. Selon l’Ins, 69,4 tonnes d’arachides
coques et 179,2 tonnes d’arachides graines ont été acheminées par route vers le
Gabon en 2007. La Guinée Equatoriale avait respectivement importé 40,2 tonnes
et 20 tonnes. Par voie maritime l’exportation des arachides, avoisinaient 456 tonnes.
Des producteurs affirment que l’exportation des arachides est plus rentable,
car les coûts de transports pour les distribuer sur le marché
local sont exorbitants. « Le transport d’un sac de 50 Kgs par train coûte
5000 Fcfa et le camion 3000 Fcfa. Pour entrer dans nos comptes, on doit hausser
les prix », se plaint Ousmanou Bey, producteur. Il précise que
l’augmentation des coûts de transport est à l’origine de la hausse vertigineuse
du prix des arachides depuis quelques années.
Usage
Scientifiquement
appelées Arachis hypogaea, les graines d’arachides sont très prisées dans
l’agroalimentaire, le cosmétique. L’entreprise Inter-Agro par exemple, s’est
lancée depuis quelques années dans la transformation des arachides pour la
production de son huile d’arachide (huile végétale préparée et extraite à
partir d'arachides au moyen d'une presse hydraulique ndlr). Les responsables
expliquent sur leur site, que cette huile d’arachide de marque Tanty
est obtenue par première pression à froid des meilleures graines
d’arachide et uniquement par des procédés mécaniques. Elle est ensuite filtrée
sur toile de coton. Cette huile est utilisée par les ménagères pour faire frire
les aliments. Elle peut aussi être employée pour la préparation de mayonnaises
ou encore de vinaigrettes pour assaisonnement.
Les
propriétaires d’industries agroalimentaires, confient qu’ils sont pour la
plupart confrontés à des problèmes de qualité d’arachides. Directeur Général de
Inter-Agro, Thierry Nyamen indique que « le manque de financement
pour assurer un fond de roulement suffisant limite la capacité à
s’approvisionner en matière première de qualité. Le problème d’aflatoxine est
constant au Cameroun à cause du mauvais stockage des graines et de l’humidité ».
Les industries cosmétiques sont également de gros utilisateurs d’arachides.
L’huile de deuxième extraction de cette graine, est utilisée dans
l’industrie cosmétique comme ingrédient entrant dans la fabrication de savons,
de laits de toilette et de cheveux, importés d’Europe, d’Asie ou
d’Amérique. Dans les ménages, l‘arachide est consommée de diverses
manières : nature, bouillie’ ou grillée. Elle entre aussi dans la composition
de très nombreux plats ou sauces. Dans ces derniers cas, les graines sont écrasées,
crues ou cuites selon les plats et le produit obtenu accompagne légumes,
viandes ou poissons. L’arachide dans les ménages peut-être aussi consommée sous
forme de pâte ou de poudre. Des vendeuses commercialisent très souvent ces
pâtes cuites au feu, de manière informelle. Ces industries individuelles
permettent à plusieurs femmes, de « réunir des bénéfices qui nous permettent de
nourrir nos familles », confie Arlette T., vendeuse de caramel au marché
Central de Douala. Même dans le domaine de l’élevage, l’arachide a
un apport. Les résidus d’extraction d’huile d’arachide sont
commercialisés dans les sacs de 25 Kg et servent à l’alimentation du
bétail.
Christelle
Kouétcha
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